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Le joueur de banjo.

En général, je n’aime pas les fêtes populaires.  Ou plutôt, je les adore, mais de loin, en spectateur. Surtout ne me demandez pas de participer à une quelconque activité de rue…

Ce soir-là, je déambulais dans les rues animées et piétonnes de C……., regardant ces statues blanches, immobiles et humaines maquillées comme des cadavres et au clin d’œil facile. La rue était animée, les restaurants bondés, toutes tables dehors. En marchant, bousculé souvent par des personnes, adultes et enfants, semblant souffrir de la danse de saint-guy*, je traversais des sphères d’odeurs qui émanaient de pizzérias, de crêperies, de restaurants divers de toutes nationalités. Cette rue débouchait sur une petite place circulaire d’où semblait provenir une musique rythmée. Je me disais que mon odorat était saturé et qu’il était temps de fatiguer mon ouïe. Il y avait là, un joueur de banjo qui chantait en grattant ses cordes. Mais pourquoi son regard se posa soudain sur moi ? Je crus lire dans ses yeux une haine séculaire et je vis son banjo s’agiter dans ses mains, comme s’il tenait une arme. Avais-je connu cet homme dans une autre vie ? Avais-je séduit sa femme il y a bien longtemps ? Le joueur de banjo avait cessé de chanter et se dirigeait vers moi, le visage crispé. Je sais que je ne suis pas courageux, je n’ai pas honte de le dire et devant ce danger flagrant, je commençais à marcher pour quitter le plus rapidement possible cette place maudite. Deux rues plus loin, le joueur de banjo était toujours derrière moi, essayant de me rattraper. Et alors la tuile, une famille entière d’origine italienne, me bloqua au coin de la rue Trois Mousquets. J’ai alors pensé à Aldo Maccione et à une insulte latine bien sentie, mais soudain une main nerveuse me serra l’épaule. En me retournant, je me retrouvais face à face, avec le joueur de Banjo…

                                                                                                                Prof83

*Danse de Saint Guy : ou chorée. Gestes involontaires et désordonnés évoquant une danse. Ils se voient lors d'une atteinte des noyaux gris centraux du cerveau, d'origine souvent infectieuse.