La vallée des Merveilles *.
Les jours qui suivirent, jeanne me lança souvent des invitations muettes pour que je la suivisse dans les toilettes. Moi, je faisais celui qui ne comprenait pas et j’attendais qu’elle formulât oralement ses envies de massages labiaux sur une partie de mon anatomie.
Eternel recommencement, Adrien, un prof d’EPS, avait accroché une affichette sur le panneau en liège réservé aux profs. Cela provoqua un petit attroupement devant ce qui n’était qu’une invitation sportive.
Lorsque je lus l’affichette, je fus saisi comme d’un malaise. Marilyne, la prof de philo s’empressa de m’embêter :
- Alors on s’inscrit ? J’adore les randonnées difficiles !
Je lui lançais un regard qui ressemblait à un regard de détresse. Je ne pus que lui dire :
- Je préfère faire fonctionner mes neurones plutôt que mes muscles !
Elle pouffa :
- Tu as des muscles toi ? Tu n’es pas sportif ?
Je répliquai :
- Je suis aussi sportif qu’un éléphant tétraplégique !
Cela fit rire Jeanne, qui nous surveillait à cinquante-huit centimètres, distance admise par le comité olympique pour suivre, sans gêne, une conversation.
Marilyne insista en me faisant miroiter, à demi-mots, une partie de jambes en l’air.
- Tu sais, il y a un refuge où l’on pourrait s’isoler quelques minutes pour…
Jeanne fronça les sourcils.
Et moi je répondis :
- Il me faut beaucoup plus de temps que ça, pour… ! Au moins cinquante-six minutes !
Et ce fut au tour du prof d'EPS d’éclater de rire.
Attaqué de toutes parts, je décidai de me retirer dans mon coin pour m’asseoir sur mon fauteuil préféré et faire la gueule.
Jeanne vint s’installer près de moi. Avec son esprit maternel, elle essaya de me remonter le moral.
- Si tu veux, on peut aller faire un tour où tu sais…
En disant cela, elle avait ouvert la bouche, sans s’en apercevoir, en lui donnant une forme arrondie des plus évocatrices. Décidément, elle appréciait ma liqueur, mais moi je ne voulais pas que tous mes autres collègues pensassent que nous formions un couple. Alors, impoli comme un taximan finlandais, je me levais sans rien dire pour aller dans ma salle corriger quelques copies. Il me restait trente-sept minutes avant la reprise des cours à quatorze heures. La digestion et la correction forment un couple mal assorti et je commençais à m’endormir sur une copie lorsqu’on frappa à la porte de ma salle…
A suivre…
Notes :
* C’est un petit bout de France, tout en bas à droite de la carte, aux confins de l’Italie, et qui ne fut d’ailleurs français qu’en 1947. À seulement 30 km à vol d’oiseau de la Côte d’Azur, la région montagneuse autour du village de Tende, à la limite sud du Parc national du Mercantour, semble loin de tout.
Pour s’y rendre depuis Nice, il faut emprunter la vallée de la Roya, berçant une rivière aux airs de torrent, qui achève sa course à Vintimille. En chemin, la Roya traverse hameaux et villages perchés : Tende, Saorge, La Brigue et Breil, où l’histoire a laissé chapelles de la Renaissance, cloîtres et clochers baroques.
Près de la frontière italienne, dans les hauteurs de Tende, se trouve l’un des coins les plus grandioses du Mercantour : la vallée des Merveilles – sans oublier sa copine Fontanalbe – et leurs 40 000 gravures rupestres de la Préhistoire tutoyant les sommets des Alpes. Un cadre unique pour des randonnées inoubliables. Cette vallée-là, unique et étrange, n’a pas volé son nom !
Commentaires
A Gaby.
Merci pour ton com.
C'est vrai que la vallée des Merveilles est magnifique, mais très fatigante!
Bonne soirée.
Bonsoir prof
Superbes photos de la vallée des Merveilles!
J’aime bien cette phrase<< Je suis aussi sportif qu’un éléphant tétraplégique >>
Merci pour ce bon moment de lecture. Bonne soirée