Edmond Trianglo, 69 ans (ou plus), professeur de mathématiques.
Edmond me regardait, mais pas franchement. Il avait l’attitude apeurée de celui qui allait mal finir. Dans peu de temps certainement. Je n’étais pas sûr qu’il me reconnût. Le bureau, derrière lequel il était assis, avait l’aspect d’un champ de bataille qui me mettait mal à l’aise.
- Tu vends de la philo, c’est ça ? murmura-t-il.
Il avait oublié que j’étais prof de physique. Je le lui dis. Oui je vendais de la physique au poids, j’en vendais des tonnes, des mètres cubes, des kilomètres à des élèves qui n’assimilaient rien, préoccupés par des activités plus que douteuses qui détruisaient leur cerveau.
Franchement j’avais envie de fuir, comme ça, tout abandonner, cesser de lutter. Mon cerveau devenait de la bouillie « premier âge », à la citrouille parfumée à la citronnelle. Mais il fallait que je lui demandasse, à ce prof-vintage, égaré dans l’espace-temps, des précisions sur Gaëlle et Roxane. J’essayais d’articuler le mieux possible pour que mon message ne fût pas brouillé par sa surdité plus qu’avancée.
- Dis-moi, que penses-tu de Gaëlle et de Roxane, de terminale S ?
- Gaëlle et Roxane ? Gaëlle et Roxane ?
Il psalmodiait des noms, certainement inconnus de lui ou plutôt oubliés.
- J’ai remarqué qu’elles avaient toujours 18 en mathématiques.
- Peut-être oui, ne se mouilla-t-il pas.
- Peux-tu vérifier sur ton carnet de notes, s’il te plait ?
Edmond Trianglo pataugeait encore dans des carnets de notes que les librairies et les papeteries ne vendaient plus, vu que c’était démodé et qu’en plus elles avaient toutes fait faillite.
Il chercha dans ses affaires, le pauvre, et par un miracle incompréhensible il le trouva. C’était une sorte de cahier rouge à la mine chiffonnée. La couverture cartonnée était ridée et tachée comme son visage. Ses doigts déformés par de l’arthrose, gonflés et tordus comme ceux d’une sorcière, avaient du mal à faire défiler les pages.
- Oui vous avez raison, s’étonna-t-il.
Ciel, il ne me tutoyait plus ! Ma visite avait dû lui faire perdre quelques milliers de neurones. Et les souvenirs qui vont avec.
Bon il fallait bien que je menasse cette affaire jusqu’au bout :
- C’est bizarre, avec moi elles ont toujours zéro. Elles sont nulles en physique et je me demande bien comment elles se retrouvent en terminale S.
Il parut gêné, Edmond. Secoué par mon attaque peu amicale, quelques DEL peu lumineuses avaient dû s’allumer dans son cerveau. Il trouva une parade de pacotille :
- Je leur donne des cours particuliers !
- Ne serait-ce pas plutôt elles qui vous donnent quelque chose ? Ou plutôt qu’elles vous vendent ?
Je soupçonnais tout simplement, qu’en échange de leurs strings, Edmond mettait 18 à tous leurs contrôles. Il lança un « heu » qui ressemblait à un hennissement prolongé d’un vieux cheval mené à l’abattoir.
Je craignis brusquement qu’il me fît là, brutalement, un infarctus pédagogique. Et ce sont les pires ! Il se leva sans rien dire et se dirigea vers une armoire métallique grise, cabossée et rouillée aux entournures. Il revint avec une boîte en carton qu’il posa devant moi.
- Tenez, je vous donne tout si vous n’avertissez pas le proviseur !
Quel marché me proposait donc Edmond Trianglo, le professeur de mathématiques ?
Un peu curieux, quand-même, je soulevai le couvercle en carton et je découvris…
A suivre…
Commentaires
Bonjour Prof.et bonne journee
bon il y a quoi sous le couvercle???bon lundi nous toujours noyé...
A Gaby.
Bonjour.
Merci pour le com.
Les vacances seront les bienvenues.
Bonne soirée.
heu ce n'est pas ma gaelle!!!!!bon dimanche
Bonjour Prof.
Je me suis absenté une semaine, j'ai mis ma lecture à jour.
Je ne connaissais pas l'infarctus pédagogique.
Bonne semaine, les vacances sont proches!