Ce que je découvris alors aurait plongé dans l’extase un fétichiste convaincu de petites culottes et cette boîte aurait représenté, pour lui, la caverne d’Ali-Baba. Il y avait là un tas de strings surtout, de couleurs variées : noires, blanches, chair, dorées même. Chaque exemplaire représentait un 18 sur un devoir de mathématiques de Gaëlle ou de Roxane. Je ne sais pas pourquoi, mais ma main plongea dans cet amoncellement de tissus multicolores, histoire de connaître leur nature: lycra ? coton ? soie ?...Malgré moi, un frisson malsain parcouru mon échine, que je réprimais bien vite ; c’était une question de moralité qui ne devait souffrir d’aucune dérive. Aussitôt je retirai ma main comme mordue par un piranha de la pire espèce. Edmond sembla se réveiller d’une léthargie de pré-sénilité acquise au cours des longues années passées à enseigner dans des conditions pires que celles des rues de Kaboul à la nuit tombée et se méprit sur mon geste. Les Talibans ont des kalachnikovs et les élèves, des armes encore plus destructrices : des Smartphones !
- Oh, ne t’inquiète pas ! Tous ces strings sont propres !
Il me tutoyait de nouveau.
Une panique rétroactive fit vibrer les racines de ma moelle épinière, quand je pensai à la vie de débauche, avec toutes les maladies qui vont avec, que devaient mener Gaëlle et Roxane depuis bien des années…
Je respirais un bon coup pour enrichir en oxygène mon cerveau qui détestait être en apnée. Edmond était déjà ailleurs ou nulle part, projeté dans un monde de fantômes gélatineux qui le harcelaient. Sa mémoire, par à-coups, remontait à la surface :
- Mais si vous voulez, j’ai une autre boîte qui contient des petites culottes sales !
On atteignait là le paroxysme du scabreux !
Edmond Trianglo, le prof de maths qui portait si bien son nom, se rendait-il compte du marché qu’il me proposait ?
- Non, ça ne m’intéresse pas ! répondis-je sèchement.
En regardant la tête de mon vieux collègue, je me dis que je ne pouvais pas lui infliger ça, avertir le proviseur. J’allais donc abandonner la partie, laisser faire, continuer ainsi jusqu’à la fin de l’année scolaire. De toute façon, dans l’éducation nationale il y avait des mystères jamais éclaircis et un peu plus, un peu moins, cela n’allait pas changer la face du monde.
Je m'apprêtais donc à quitter la salle 17, quand deux coups discrets furent frappés à la porte. Edmond, naturellement, n’entendit rien.
Gaëlle et Roxane entrèrent sans se gêner. Elles parurent un peu surprises en me voyant, sans plus. Elles dirent en chœur :
- On vient pour le cours particulier de mathématiques !
Et en jetant ses yeux dans les miens, Gaëlle ajouta :
- Mais ce serait sympa d’avoir aussi une aide en physique !
Je commençais à avoir des bouffées de chaleur devant l’audace de ces deux filles. Je ne réagis pas quand je vis nos deux élèves aller faire la bise à leur vieux prof de math.
Roxane s’avança vers Edmond en lui tendant une boîte de gâteaux entourée par un ruban rouge :
- C’est pour vous remercier de votre gentillesse, Monsieur Trianglo, comme d’habitude, ce sont vos friandises préférées avec le parfum que vous adorez !...
Et Edmond devint tout rouge.
Et moi je me demandais si cette boîte contenait vraiment des gâteaux…
A suivre…
Commentaires
A Gaby.
Bonjour.
Merci pour le com.
Oui, il y a des mystères dans l'éducation nationale!
Bonne journée.
Bonjour Prof.
Il s'en passe de belle dans l’éducation nationale!
Bonne journée.
le mystère est levé ......à suivre bon jeudi