VEF Blog

Titre du blog : Professeur.
Auteur : prof83
Date de création : 28-01-2008
 
posté le 02-05-2014 à 07:25:48

Grasse (92).

 

 *

Bon, les nuits blanches, je connais ça ! Dormir deux heures seulement ne me dérange pas du tout. Mais là, c’était différent.

Brigitte devait m’annoncer une triste nouvelle apparemment, certainement liée à Lola. Hélas pour moi, elle en a été empêchée par l’arrivée d’un fidèle client qui l’a enlevée dans sa puissante voiture. Dans ma tête, elle avait injecté une sorte de virus mortel, celui de l’appréhension d’un malheur arrivé à ma pute chérie, Lola, qui avait toujours refusé de faire l’amour avec moi. Lola disparue depuis des mois, certainement enlevée par le gang des parfumeurs grassois, commandé par Mr. Gédebras, mon voisin, manchot de son état, qui l’avait « transférée »  à Bamako, au Mali, dans un bordel où les françaises blanches devaient avoir beaucoup de succès, hélas. J’imaginais Lola, morte, étranglée par un client schizophrène ou bien la gorge tranchée par un drogué qui en voulait à l’argent de ses nombreuses passes. Comment dormir avec cette idée dans la tête ? Je devais à tout prix revoir Brigitte, pour qu’enfin, elle me dît ce qu’il s’était vraiment passé.

Mon réveil numérique indiquait 0 :05 en gros chiffres lumineux rouges qui maintenaient un semblant de luminosité dans ma chambre. Elle devait en avoir terminé avec son client, Brigitte, et peut-être était-elle déjà de retour dans la rue, sur son trottoir, à tapiner, pour terminer sa nuit. Il suffisait que je la rejoignisse pour me vider la tête (oui la tête !) et retirer de mon cerveau cette vrille en acier qui s’était enfoncée dans mon crâne. L’incertitude, alliée au pessimisme, voilà ce qui mine une vie, qui la ramollit, qui la fait fondre et couler par terre comme un sirop gluant et nauséabond.

Je m’habillais en vitesse, sûr de ne rencontrer personne à cette heure de la nuit. Le hall de l’immeuble était éclairé et dehors la rue semblait sommeiller. Les voitures en stationnement dormaient sans ronfler, les chats menaient leur vie et peut-être les rats aussi. Je marchais, sur le trottoir étroit, le plus vite possible. J’avais quand-même peur de faire de mauvaises rencontres, des bandes de nazes qui sortaient des boîtes, souls et drogués, des boîtes de nuit de Cannes (située à 18km de Grasse) qui attiraient beaucoup de monde.

 *

 

 *

Au bout de la rue, je tournais à droite pour plonger sur une longue avenue mal éclairée. C’est là que tapinait Brigitte, à une centaine de mètres, adossée à un réverbère, plus lamentable qu’elle. Dieu seul sait ce qu’elle avait fait, avec l’autre, le conducteur de l’Alfa-Roméo. Moi, je m’en fichais, je voulais seulement savoir ce qui était arrivé à Lola ! Quand elle me vit, elle commença à se dandiner en avançant vers moi, un réflexe de pute…Quand je sentis son parfum (peut-être Shalimar ?), je sus que la pieuvre allait tenter de m’étouffer. Elle me proposa un petit jeu avec sa bouche pulpeuse, dans sa voiture. Je la suivis comme un âne que j’étais.

- C’est trente euros ! me dit-elle, sans capote.

Moi, je n’étais pas assez fou, pour tremper mon caramel encore mou dans sa bouche qui avait dû en connaître des tornades spermatiques !

Je lui donnais ses trente euros, mais juste pour savoir ce qui était arrivé à Lola, sa copine.

Elle me regarda comme si j’étais un moine défroqué de la paroisse voisine. Apparemment, elle ne savait pas ce que j’attendais d’elle. Elle avait l’air droguée, en plus. A quoi ? Allez savoir !

Elle se mit à rire quand je lui parlais de Lola.

Etait-elle devenue folle ?

Dans un éclair de lucidité, elle comprit ce que je voulais savoir.

- Mais, il s’agit de Paulo, cria-t-elle, ce qui effraya un chat qui passait par là.

Je devins plus hagard qu’elle, perdu dans cette nuit grassoise parfumée à l’essence de lavande.

Elle précisa :

- Paulo, le mac de Lola, a tenté de se suicider dans sa prison en se pendant à un barreau de la fenêtre de sa cellule avec son caleçon long !

Pauvre Paulo !

J’étais quand même rassuré : Lola était vivante et j’avais au moins encore une chance de la baiser !...

 

A suivre