VEF Blog

Titre du blog : Professeur.
Auteur : prof83
Date de création : 28-01-2008
 
posté le 12-06-2014 à 08:35:25

Grasse (101).

 

 

L’oublier, oui, c’était tout ce qu’il me restait à faire !

Oublier Sandrine.

Ne plus penser à elle, éviter de la rencontrer au lycée, la fuir comme la peste du Moyen-Age.

Il y avait bien un lieu ultra-dangereux pour moi : la salle des profs où nous nous retrouvions aux récrés pour souffler un peu, nous reposer et boire un café en parlant de nos soucis.

Après mon escapade ratée au festival de Cannes, de retour chez moi, et cela de 17h à 2h du matin (heure à laquelle je parvins à m’endormir un peu), je ne pouvais m’empêcher de me faire du mal : penser à Sandrine et à Basile, à ce qu’ils avaient certainement fait à Cannes, une ville de perdition, dans des endroits peu confortables à l’abri des regards indiscrets, car le sexe à ses raisons que la raison ne connaît point (tiens ça me rappelle quelque chose ça*).

Ce n’était pas tant la jalousie qui laminait mes neurones, mais plutôt mon orgueil blessé qui maintenait la porte ouverte, la porte de l’oubli, la porte qui grince en plein milieu de la nuit.

Tout le long du trajet entre Grasse et Cannes, Sandrine s’était montrée distante, froide comme une momie enfermée dans un congélateur. Je me disais alors que c’était son caractère réservé qui la faisait agir ainsi.

Parfois, je suis plus idiot que je ne l’imagine !

Il y a la métamorphose de la chenille en papillon bien connue des élèves qui écoutent et qui apprennent leurs leçons, mais moi j’ai assisté à un autre genre de métamorphose, celle de Sandrine lorsqu’elle a rencontré Basile, le prof d’EPS, à la sortie du cinéma. Elle devint subitement chaleureuse et même souriante et excitée comme si elle avait avalé un morceau de Vésuve incandescent. Bref, pour être vulgaire, elle s’était transformée en une chienne en chaleur.

Au lycée, c’était la période d’avant-bac, celle où les élèves sont absents et où l’on pouvait souffler un peu et préparer déjà l’année scolaire suivante. On errait pas mal dans les longs couloirs de l’établissement et on squattait à longueur de temps la salle des profs, avachis sur les fauteuils de couleur bleu-pétrole, à la propreté incertaine. C’était un lieu idéal de rencontres. Moi, assis tout au fond, j’évitais de poser mes yeux sur ELLE, histoire de l’oublier une bonne fois pour toute. Elle m’envoyait parfois un regard incertain comme un lanceur de couteaux qui projette des points d’interrogation. Je ne répondais pas à ses bonjours lancés à la cantonade quand elle entrait dans la salle en remuant sa croupe bien moulée dans son jeans délavé (ciel je replonge !).

Bref, je lui faisais la « gueule » !

Finalement Sandrine ne me connaissait que lorsqu’elle avait besoin de moi, pauvre cloche serviable, comme la fois où elle m’avait demandé de l’aider à décoller la vieille tapisserie de l’appartement qu’elle venait d’acheter dans le vieux Grasse ou quand elle eut la lubie d’assister au festival de Cannes.

Mais c’était fini, j’avais juré de ne plus me laisser avoir.

Pour meubler mon temps libre dû à l’absence de mes chers élèves, je rangeais mon labo qui était dans un désordre indescriptible. Le garçon de laboratoire était en congé de maladie depuis plus de six mois à cause d’un eczéma diplomatique provoqué, d'après-lui,  par les émanations des produits chimiques stockés dans le labo.

Ce jour-à, à quatorze heures trente, quelqu’un frappa à la porte…

 

A suivre

 

Notes :

 

* "Le cœur a ses raisons que la raison ne connaît point. " est un adage philosophique de Blaise Pascal issu de ses Pensées. Stylistiquement, cette citation est une diaphore puisque les raisons et la raison sont à prendre dans deux sens différents.

 

 

Commentaires

anaflore le 12-06-2014 à 09:14:34
adage est bien employé ..;j'y pensais bon courage