S'il vous plait, Monsieur le Proviseur, ne m'obligez pas
à retirer tout ça pour entrer dans la salle de classe.
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Lundi, la pré-rentrée !
C’est juste le début d’une longue année scolaire qui n’a pas encore commencé.
Cette journée est comme un sas, une antichambre de la salle des tortures, une tranchée de la guerre 14-18, un lieu où l’on est encore à l’abri, car demain on va bien y être obligé de sortir du ventre de la terre pour aller combattre nos pires ennemis, sanguinaires comme les vautours de la Pampa : les élèves !
On est faussement enjoués quand on arrive dans la salle des profs en ce premier matin du marathon scolaire. On s’embrasse entre profs mâles et femelles avec un sourire de façade, une sorte de masque joyeux qui dissimule à peine l’angoisse de l’inconnu.
Comme d’habitude j’arrivai le premier dans cette salle si bien rangée le premier jour. Par curiosité je passais en revue les casiers qui placardaient trois murs de cette pièce pentagonale sortie de l’imagination d’un architecte certainement alcoolique, juste pour savoir si de nouveaux profs avaient été nommés dans notre lycée. Apparemment cinq enseignants allaient débarquer dans notre établissement :
Lionel Allaru Patrice Pianot Michèle Latuire Emeline Fiton Pascale Degrège |
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Ce ne sont pas les vrais noms.
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La seule bonne nouvelle, c’était l’arrivée de trois femmes qui, je l’espérais, n’étaient pas encore ménopausées (l’espoir fait vivre).
Par contre le nom de Sandrine, la prof de lettres modernes, avait disparu. Je sentis brutalement comme une dilatation de mon angoisse qui naquit sous mes cheveux pour se propager jusqu’à mes chevilles qui semblèrent gonfler, devenir violacées et douloureuses.
- Ciel, ne ferais-je pas deux phlébites symétriques ? me dis-je en me penchant en avant après avoir soulevé le bas de mon pantalon.
C’est à ce moment-là qu’apparut dans l’encadrement de la porte de la salle des profs une nouvelle prof qui devait être Michèle Latuire née aux alentours de 1960. Immédiatement mon taux de testostérone chuta brutalement et la fierté de mon bas-ventre se recroquevilla comme un macaroni trop cuit.
Elle voulut me faire la bise. Je n’étais pas dans une tenue très académique : figé comme j’étais, j’avais oublié de rabaisser le bas de mon pantalon.
Elle embaumait « Shalimar » de Guerlain, ce qui fit remonter sa note de cinq points.
Je sentis sur ma joue une ébauche de moustache, ce qui provoqua chez elle une perte de trois points.
Je recommençais à noter. Je retrouvais ainsi mon instinct sauvage de prof qui s’était un peu ramolli pendant les vacances…
A suivre...