Souvenirs, nostalgie...
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Jeudi, dans la salle des profs pendant la récré de 10h.
J’étais assis dans mon fauteuil préféré en tissu bleu pétrole, plus ridé qu’un centenaire, situé dans un coin tout au fond de la salle et je regardais tous mes collègues qui s’agitaient comme des poissons rouges dans un bocal trop petit. C’était la queue devant la machine à café qui distribuait un breuvage plus que douteux, chaud et fumant dans des petits gobelets en plastique blancs ou marron* riches en phtalates** qui passaient allègrement dans la boisson sous l’effet de sa température élevée. Les profs ignoraient qu’en buvant du café, ils empoisonnaient leur sang.
Peu à peu, à cause de mon insomnie chronique qui rendait mes nuits aussi blanches que de la farine, je sombrais dans une sorte de léthargie semi consciente qui m’isolait de mon proche environnement. Pourtant, mon nez, sentinelle protectrice, détecta soudain un parfum que je connaissais : « Les jardins de bagatelle », un parfum que portait Pascale, la nouvelle prof de lettres modernes. J’émergeais alors de mon coma de pacotille et j’apercevais ma jeune collègue assise à côté de moi, avec une jupe courte qui était remonté à mi-cuisses. Il n’en fallait pas plus pour qu’une partie de mon corps se transformât en mat rigide digne de ceux des voiliers de la route du rhum. Pascale avait dû s’apercevoir de l’effet qu’elle produisait sur moi. Elle se pencha un peu plus sur mon corps d’« Apollon » en projetant son souffle chaud dans mon oreille. Je commençais à me perdre dans la forêt comme le Petit Poucet. Vite, il fallait que je retrouvasse mes cailloux :
- Dis-moi Pascale, tu sais ce que devient Sandrine ?
Sandrine était celle qu’elle avait remplacée depuis le début de l’année scolaire. Sandrine qui avait disparu sans rien dire. Je me souviens encore du baiser sur la bouche que je lui avais volé lors d’une soirée-pizza chez elle. Ma langue avait forcé ses lèvres et par pur réflexe, la sienne avait tournoyé un instant autour de la mienne. Et puis elle m’avait repoussé… J’étais parti sans rien dire et puis le gouffre…
Pascale eut un petit rictus qui fit naître une ride sur le coin de sa bouche. Elle répondit :
- Oui, je sais ! Mais je ne te le dirai pas, à moins que…
- Que quoi ? répondis-je, essoufflé comme un coureur de fond.
Pascale remua un peu dans son fauteuil, ce qui fit encore plus remonter sa jupe et mon émoi.
- Que tu m’invites à midi dans ton labo pour partager ton pan bagnat !
Elle y avait pris goût la coquine. J’hésitais à dire oui, car la dernière fois son attitude avait pratiquement saboté le cours que j’avais eu ensuite avec les 2desC. Elle détecta mon hésitation que pourtant j’avais pris soin de masquer.
- Tu n’as pas aimé ma langue ?
- Heu… dis-je. Moi-même je me trouvais antipathique.
- Tu sais, ma langue et ma bouche peuvent beaucoup mieux faire…
Je pensai soudain à Mme Coqualo ma voisine qui m’attirait dans le local à ordures de mon immeuble pour jouer de ma flûte à genoux devant moi. La chair est faible, je ne pus que murmurer :
- Oui…
La sonnerie de fin de récré me fit sursauter, mais j’hésitais à me lever à cause d’un relent d’érection qui avait du mal à s’effacer.
- Alors à midi dans ton labo, me dit Pascale.
Et elle sortit de la salle des profs avec une démarche peu naturelle…
A suivre…
Notes :
* Marron: adjectif de couleur, invariable.
** La toxicité du phtalate, comme celle du bisphénol A, dépend principalement de sa capacité à migrer du plastique dans le corps humain.
Le risque, qui porte de façon plus certaine sur la reproduction humaine, varie selon la masse corporelle, l’âge (surtout pour les fonctions de reproduction), la durée d’exposition, la nature du plastique, l’altération subie par le matériau et, bien sûr, la nature du phtalate.
Les effets secondaires provoqués par les phtalates en concentrations relativement élevées chez les animaux en laboratoire sont : la baisse de la fertilité, l’atrophie testiculaire, la réduction du poids du fœtus, la mortalité fœtale, et des malformations. Certains phtalates possèdent également un effet perturbateur endocrinien et peuvent provoquer des anomalies du développement sexuel chez le jeune rat mâle exposé in utero. De plus, il a été enregistré des effets sur le foie, les reins et le système reproducteur mâle.
La toxicité des phtalates les plus employés, tel le DEHP, est assez bien connue. Il reste cependant quelques suspicions à propos des effets cancérigènes de ces phtalates. Bien que des effets aient été prouvés sur des rongeurs (tumeurs hépatiques), les mécanismes biologiques n’étant pas rigoureusement identiques, il n’est pas possible d’affirmer que les phtalates soient cancérigènes pour l’homme.