Marina et moi
ou
l'obsession des portemanteaux "Solido".
Le lendemain de cette relation avortée, je me sentais plutôt maussade et j’en voulais beaucoup à Marina d’avoir joué le rôle de pimbêche effarouchée.
« On ne m’y reprendra plus ! » pensais-je en me rasant, le matin, devant un miroir qui se moquait de moi. Vers neuf heures, je m’installais à mon bureau pour étudier « la spectrographie RMN appliquée aux molécules organiques ». Rien de bien folichons, ces spectres dont les pics nous indiquaient la nature des radicaux carboniques. A neuf heures trente, le téléphone sonna.
« Tu peux toujours sonner, je ne décrocherai pas ! » dis-je au téléphone qui n’y pouvait rien. A la seconde sonnerie, je me précipitais vers lui comme un meurt-de-faim en espérant entendre la voix de Marina… C’était la fille des portemanteaux Solido qui me relançait pour l’achat de leurs produits. Je fus désagréable avec elle et lui raccrochais presqu’au nez. A dix heures, deuxième appel : j’étais en train de somnoler devant les spectrogrammes indigestes.
« Oui ? » dis-je avec l’énergie d’une pile en fin de vie.
C’était Marina qui avait l’air aussi gênée qu’une anorexique devant un baba au rhum.
Elle me dit qu’elle avait besoin de moi de toute urgence et que si j’étais gentil (je le suis trop hélas), j’irais la rejoindre à treize heures quarante-cinq dans son labo.
« Mais, ce n’est pas ce que tu crois… » ajouta-t-elle et après un bref moment de silence, elle compléta : «…Heu enfin, un peu, peut-être ! »
Je ne comprenais strictement rien à ce qu’elle me disait ; mais comme j’avais envie d’aller prendre l’air, j’acceptais.
Prendre l’air, façon de parler, car son labo empestait le formol.
Quand je la vis, revêtue de sa blouse blanche, un fantasme endormi, soudain se réveilla ! Elle m’expliqua la situation :
« Je dois faire une leçon sur la reproduction humaine en 3ème A et il faut à tout prix que je leur montre des spermatozoïdes au microscope. »
Je répliquais qu’elle aurait pu préparer tout ça la veille au lieu de me déranger. Elle argumenta :
« Mais les spermatozoïdes doivent-être vivants et leur durée de vie à l’air libre est très courte. »
Je comprenais où elle voulait en venir. Elle alla chercher un verre de montre (petite coupelle) qu’elle me tendit en me disant : « tu peux le faire là-dedans ».
« Mais faire quoi ? » répondis-je pour la taquiner.
En femme de sciences, elle utilisa les mots précis : « Eh bien, te masturber et éjaculer dans le verre de montre ! »
La situation devenait cocasse et pour me moquer d’elle, j’utilisais la blague préférée des machos :
« Mais ça va déborder, donne-moi plutôt un bécher de 250 mL (un quart de litre) ! »
Cela ne la fit pas rire. Elle me dit : « allez fais vite, les élèves vont arriver ! »
Faire vite, faire vite, elle me faisait bien rire Marina !
« Mais, il faut que tu m’aides pour ça ! » dis-je en essayant de profiter de la situation. Elle était exaspérée et elle vint vers moi en criant presque « ouvre ta braguette ! » C’était un ordre ! Et elle ajouta : « je vais prendre les choses en main !»
Les choses ? Elle voulait dire la chose plutôt !
Devant nous, le squelette nous regardait avec un air rigolard…
A suivre…