Serena semblait se décomposer au fur et à mesure de son monologue, sa voix un peu noyée par le bruit des percolateurs, machines à vapeur des temps modernes, qui nous enveloppaient parfois dans un brouillard parfumé d’Arabica de Colombie ou du Pérou.
« Marina me révéla que l’entreprise Solido connaissait d’énormes difficultés de trésorerie et qu’en un mot, elle était au bord de la faillite. Elle me fit comprendre, dans un premier temps, que seules, les assurances, pouvaient la sortir de cette ornière. »
Serena se tut un instant, les yeux perdus dans un monde à elle, celui que les circonstances d’une rencontre improbable, avaient créé. Mais avec courage, elle continua :
« Moi, je ne comprenais pas très bien où elle voulait en venir. Alors Marina fut plus explicite et me dit qu’un incendie de l’usine Solido serait le bienvenu pour être dédommagé par les assurances. »
Mon attention, un instant détournée sur les seins de Serena que j’imaginais plutôt en forme de poires Guyot bien fermes, replongea dans l’acide chlorhydrique, ce scénario effroyable dont je commençais à découvrir les conséquences.
Serena continua avec une voix qui essayait de survivre parmi les cris et les rires d’ouvriers attablés près de nous.
« C’est alors que Marina me proposa une forte somme d’argent si je pouvais l’aider. Oui, l’aider à incendier les usines Solido. Cela se ferait tôt le matin, quand les ateliers étaient déserts. Les sous-sols contenaient du bois et d’énormes quantités de solvants divers très inflammables. Il suffirait d’une allumette jetée sur les futs suintants de vapeurs pour provoquer un important incendie. Moi j’étais étudiante et j’avais besoin d’argent. J’avais trouvé une place de secrétaire intérimaire à temps partiel dans cette entreprise qui me permettait tout juste de payer le loyer de mon studio et mes maigres repas au resto U. J’ai donc accepté la proposition de Marina, à la seule condition que les entrepôts soient absolument déserts. »
Je me demandais ce qui poussait Serena à se confier ainsi à moi, un inconnu, à avouer finalement un acte criminel. Les remords peut-être ?
Le silence se fit soudain dans le bar, quand les ouvriers sortirent pour aller travailler. Serena baissa un peu la voix pour me raconter la suite.
« Avec Marina, on fixa la date et l’heure de l’incendie. Elle me donna la moitié de la somme prévue et me promit le reste quand cette affaire serait terminée. Mais le jour de l’incendie, tout ne se passa pas comme prévu… »
A suivre…