Serena me berça avec son sourire, petit éclair sympathique dans ce bar plein d’odeurs de café, de bruits de machine à vapeur que le percolateur fatigué, coureur de fond essoufflé, projetait dans la salle en étouffant les conversations des rares clients qui passaient.
Elle ne pensait pas que Marina eût menti et elle poursuivit sa confession :
« Après l’incendie, j’ai vécu l’enfer ! Je n’arrivais plus à sortir, je restais des jours entiers enfermée chez moi et je ne répondais plus aux sollicitations de mes amis. Un jour, presqu’au bord du suicide, je trouvai dans la poche de mon manteau, un morceau de papier sur lequel vous aviez écrit votre numéro de téléphone et ce fut une bouée que le destin me lançait. Je m’y accrochais comme une désespérée et c’est alors que je commençais à vous téléphoner au nom de la société Solido. Cela me permettait de parler à quelqu’un et je m’efforçais de ne pas vous appeler plusieurs fois par jour. Je ne vivais que pour ça : vous parler quelques minutes anonymement. »
Je l’interrompis pour lui dire :
« Et moi j’attendais votre appel, sans savoir que c’était vous ! C’était un drôle de lien qui s’était créé entre nous ; chacun avait besoin de l’autre ».
Ma main serra la sienne et ce fut avec ELLE, mon premier instant de bonheur. Je tentais de lui expliquer ce que je pensais de sa situation :
« J’ai des indices confus qui me font croire que Marina vous a bien menti et que son mari n’a pas péri dans l’incendie de son entreprise. »
Serena m’enveloppa d’un regard diffus, mélange d’espoir et d’incompréhension. Elle me murmura :
« Alors Roger est encore vivant ? Marina et lui ont donc monté ce stratagème pour toucher la prime d’assurance ? »
Je dus rectifier sa pensée :
« Non, je pense que Roger est bien mort ! »
Son regard me caressa la joue et ses yeux se perdirent dans un labyrinthe obscur que j’aurais bien aimé explorer avec elle, en lui tenant la main, en sentant sa peau sur la mienne…
« Votre patron est bien mort, mais pas comme vous l’aviez imaginé…! »
A suivre…