Le temps qui passe assouplit l’angoisse.
La lotion capillaire n’avait aucun effet sur la chute de mes cheveux, ça je pouvais m’en douter, mais ce n’était pas le but du jeu, qui était tout simplement une parade de séduction destinée à la pharmacienne stagiaire.
Ce qui m’inquiétait surtout, c’est que je maigrissais régulièrement et cela me coupait l’appétit, provoquant invariablement une perte de poids. C’était le paradoxe du serpent qui se mordait la queue.
J’appris un beau matin que la police avait débarqué dans le labo de Marina et qu’elle avait saisi le squelette. Les experts déclarèrent, après des analyses ADN poussées, que ce squelette n’était autre que celui de son époux prénommé Victor que l’on avait cru mort, brûlé dans son usine de portemanteaux Solido.
L’affaire comportait encore de nombreux points d’ombre. Le commissaire Lataule avait sa petite idée là-dessus.
1- Marina avait assassiné son mari.
2- Pendant quelque temps, elle fit agir de la soude caustique sur le cadavre placé dans sa baignoire pour désagréger les chairs et obtenir des os parfaitement propres.
3- Patiemment, elle transporta ces os, en pièces détachées, dans le labo de SVT du collège, où, grâce à ses connaissances en anatomie, elle avait reconstitué un squelette qu’elle avait prénommé Victor, comme feu son mari.
4- Par ce stratagème, elle avait fait croire que son époux était mort accidentellement dans l’incendie.
L’affaire avait fait grand bruit au collège, surtout quand les policiers vinrent arrêter Marina en plein cours des 3èmes B. Menottée, la tête baissée, elle sortit de sa classe sous les rires et les quolibets de ses élèves qui étaient contents de ne plus avoir SVT pendant un certain temps.
Quand mes idées devenaient plutôt grises, il m’arrivait de penser à Marina, presqu’avec tendresse. Ma quenelle était en berne depuis pas mal de temps. Elle avait juste redressé la tête, un bref instant, quand mes yeux se portèrent innocemment vers le bas-ventre de la jeune pharmacienne qui exposait sans vergogne un « cameltoe » impudique, qui aurait réussi, j’en suis certain, à rallumer la flamme du soldat inconnu.
Je retournai dans la pharmacie sous le prétexte fallacieux d’acheter des préservatifs. A quoi m’auraient-ils servi mon Dieu ? C’était juste pour la revoir, elle, la fille au short en jeans.
Elle me demanda le modèle, la taille et la marque que je désirais. Mon regard devint alors aussi fuyant que celui de Benoît, le benêt de 3èmeA, quand je l’interrogeais et qui avait zéro de moyenne (par générosité).
Je commençais à avoir honte car derrière moi la queue s’allongeait (pas la mienne, par contre…), alors la pharmacienne me tendit de la pub préservative en me disant :
- Quand vous aurez fait votre choix, appelez-moi, je me prénomme Sonata…
A suivre…