Hortensia perdit, comme par miracle, son incompréhensible agressivité contre moi. Elle s’assit sur le canapé, juste en face de la table basse en verre où était posé l’album de ses dix photos. Son regard avait l’acuité de celui d’un aigle qui plonge vers sa proie.
- Si tu veux, on regarde les photos ensemble ! me dit-elle.
Je n’en avais pas trop envie, préférant les admirer lorsque j’étais seul, la nuit pendant mon insomnie chronique.
Je contemplais ses yeux bleus ; ils avaient la profondeur de la fosse des Mariannes(1). Je désirais leur parler moi, leur dire combien ils me troublaient. Je lui rappelais sa promesse de me montrer ses seins, elle me répondit :
- Je n’ai pas oublié !
Pour cela, elle devait retirer sa robe et sans pudeur, elle me demanda de l’aider à ouvrir la fermeture-éclair qui se trouvait dans son dos. Je ne sais pas pourquoi, mais chaque fois qu’elle accélérait, moi je freinais. Je lui en fis la remarque, elle répliqua :
- Tu dois être un peu caractériel !
- C’est ce que me fit savoir Sonata avant de disparaître dans la forêt amazonienne enlevée par les indiens Jivaros! lui répondis-je.
Et j’ajoutais :
- Elle m’a même qualifié de rustre !
Hortensia se mit à rire :
- Caractériel comme tous les poètes, ça c’est sûr, et c’est ce qui fait ton charme, mais certainement pas rustre ! Elle n’a pas pris la peine de réfléchir sur ton comportement avec elle !
Bien que disparue à jamais, l’ombre de Sonata, planait encore un peu dans ma tête.
Je fis glisser, vers le bas, le zip de la robe d’Hortensia. Ma main tremblait un peu, j’avais honte, à mon âge, d’être aussi émotif. Elle abaissa le haut de son vêtement, ce qui fit une bouée de tissu autour de sa taille.
- Défais mon soutien-gorge ! me dit-elle avec une voix assez autoritaire.
Je freinais aussi fort que possible comme si j’étais en face d’un danger imminent. La voir en petite tenue, malaxait mon âme et faisait grelotter mes neurones. J’essayais de retarder le moment où j’allais pouvoir admirer ses seins.
- Et si j’éteignais la lumière ? murmurais-je, peu convaincu du succès de ma proposition.
Hortensia hésita un instant et cela dut la conforter dans sa croyance en mon comportement caractériel. Contre toute attente, elle répliqua :
- C’est une bonne idée finalement ! On va jouer !
Je lui proposais de m’éloigner d’elle et, dans le noir absolu du salon, de la rejoindre sur le canapé.
- Ca va être dur de me retrouver ! me dit-elle, excitée comme une puce.
- Ne t’inquiète pas, ton parfum me guidera !
Dans mon cerveau, l’aire olfactive devait être particulièrement développée.
Pendant quelques instants, « L’air du temps » de Nina Ricci, fut mon chien d’aveugle qui me conduisit vers elle…
A suivre…
Notes :
1-La fosse des Mariannes est la fosse océanique la plus profonde actuellement connue et est l'endroit le plus profond de la croûte terrestre. Elle est située dans la partie nord-ouest de l'océan Pacifique, à l'est des Îles Mariannes, à proximité de l'île de Guam. Le point le plus bas connu se situe selon les relevés à 10 994 mètres de profondeur.
Commentaires
Bonjour,
Merci..j'ai appris quelque chose: l'existence de la fosse des Mariannes.
Je ne savais pas non plus, qu'on pouvait assimiler l'enlèvement d'un soutien-gorge, au supplice de Tantale.