Auteur : prof83
Date de création : 28-01-2008
Les Huns.
Comme d'habitude, je les attendais sur le pas de la porte, mes troisièmes préférés (je plaisante). Le drame pour moi, c'est qu'ils sont arrivés par petits groupes. Ainsi, quand j'en ai vus une bonne dizaine au début, je me suis dit que le reste de la classe devait être absent, vu que le conseil avait eu lieu lundi. Ma joie fut de courte durée, car au fur et à mesure, ils arrivèrent en ordre dispersé. Et au final je me retrouvai avec la classe complète. Premier coup au moral en ce vendredi après-midi, chaud, lourd, orageux. Je les fis entrer dans la salle. Ils portaient en eux le gène de l'agitation certainement. Un gène qui avait dû muter entre les murs du collège, ce chaudron magique qui donnait naissance à toute une série d'élèves excellents, bons, moyens, mauvais nuls... Ils étaient là, tous devant moi, parlant, gesticulant, comme si je n'existais pas. J'aurais bien voulu lancer un cri terrible pour les faire taire, mais je n'en avais pas la force. Alors je les ai regardés, un par un, sans sourire, comme un sonar qui sonde le fond de l'océan à la recherche de torpilles meurtrières. Je savais, par expérience, que c'était une méthode qui fonctionnait bien. Un à un ils se turent, un à un ils s'assirent. Il était déjà 14h08min. Moi, j'avais déjà pas mal puisé dans mes réserves d'énergie. Une énergie qui n'était pas inépuisable et qui donnait des signes de pénurie aussi grave que celle du pétrole.
Première étape atteinte : le silence.
La deuxième étape ressemblait à une deuxième étape du tour de France pour des coureurs déjà fatigués et qui stressaient en pensant à toutes les dures étapes qui restaient avant l'arrivée à Paris. Les faire travailler. Croyez-vous aux miracles vous ? Au risque de décevoir pas mal d'entre vous, j'affirme avec solennité que les miracles n'existent pas au collège ! Ailleurs, oui, peut-être, mais au collège non ! J'avais préparé du travail en abondance pour parer à tous les coups tordus qu'ils risquaient de me faire. J'avais devant moi une brochette de paresseux de la pire espèce.
- Rodolphe qui savait qu'il allait redoubler et qui se croyait déjà sur la plage du Veillat à Saint-Raphaël.
- Antoine, grand gaillard un peu roux qui manipulait quelque chose, les mains sous la table.
- Aline tout au fond qui avait entamé un marathon de bavardages avec sa copine Lucie qui avait remporté la médaille d'argent de logorrhée aux derniers jeux olympiques.
- Loïc qui louchait sur Pascale, dans un sursaut de romantisme peu académique.
- Nathalie qui gloussait bêtement en écoutant Grégoire, le dragueur professionnel, qui avait un succès fou auprès des filles et qui était presqu'aussi laid que Quasimodo.
- Adrien qui ne savait plus où il était et qui avait sorti son cahier de géographie.
- Gérard, son copain qui se moqua immédiatement de lui.
- Stéphanie, la commère qui voulut savoir pourquoi Gérard riait...
Et ainsi de suite. Tout cela pendant que je distribuais les photocopies sur la tension alternative. Certains, des saints certainement, s'étaient mis au travail. On ne s'occupe pas des meilleurs hélas. Toute notre énergie est accaparée, et c'est un phénomène physique, par les pompeurs d'énergie : les bavards, les paresseux, les menteurs, les insolents...
Bon, rassemblant le peu de courage qui me restait je me dirigeais vers les deux bavardes professionnelles pour leur demander de se séparer. Ce fut presque une lutte au couteau. Je n'ai pas cédé et j'ai obligé Aline à aller au premier rang sous les regards de haine de sa copine qui aurait bien séduit un sorcier vaudou pour qu'il me transforme en zombie.
Vers 14h27, j'entendis dans mon dos : « Msieu, msieu, y a Antoine qui saigne ! ». J'imaginais le pire, genre coup de couteau donné par un rival jaloux. Mais non, Antoine saignait abondamment du nez, parce qu'il s'était mouché un peu trop violemment. Direction l'infirmerie accompagné du premier délégué de classe. Cinq minutes plus tard, Coralie levait le doigt pour me demander : « Msieu, je peux aller à l'infirmerie, j'ai mal à la tête ! » Et de nouveau deux élèves qui s'en vont. Vers 14h42, Claire me demande de sortir pour aller refaire son bandage au pied. Je fis mine de ne pas la croire, elle me mit presque sous le nez une bande stérile en me disant : « Et ça c'est un mensonge ? » Et elle sortit. Faisons le compte, il y avait à ce moment là cinq élèves à l'infirmerie. Je me souviens, il y a quelques années, d'un prof, qui avait perdu ainsi, dix huit élèves qui avaient eu des malaises imaginaires. La fin de l'heure fut plus calme. La sonnerie de 14h55 me mit du baume au cœur. J'allais alors la voir ELLE, mon rayon de soleil dans ce monde sinistre. Et en entrant dans la salle des profs, ce que je vis, hoooo, je n'ose pas vous le dire....Ce fut un choc !
nb: les prénoms ont été changés.
Commentaires
Vraiment génial votre article. Beaucoup d'humour et de lucidité. Même vu avec les souvenirs d'une vieille colégienne. Apparemment les choses n'ont pas tellement changé.
Votre article m'a fait pensé à un de mes profs (que, au passage j'adorais), c'est tout à fait le genre de propos qu'il aurait pu tenir.
Un petit bémol : Je veux la suite ! Qu'est-ce qu'il y avait derrère la porte de la salle ds profs ?
Bonne soirée.
Deuxième billet que je lis : cette fois, je pleure de rire !!!
quel suspense !! intenable ! allez encore une petite confidence !
Philippine
c'est un regal de vous lire, jolie classe ...si je me rapelle mes années de lycée, le voyage à l'infirmerie était vraiment unmoment savoureux.
c'est bientôt lees vacances, courage...
impatinet ede savoirla suite.
Bé
Raaahhhh! Qu'est-ce que tu m'énerves quand tu t'arrêtes sur du suspense! (en même temps, c'est l'effet voulu n'est-ce pas?). Bref, je n'ai plus qu'à attendre, mardi (vu que le lundi tu ne travailles pas). Quoi que après tout, tu sais la fin de l'histoire, tu peux donc la mettre demain! bisous
Bon dimanche Prof, repose toi bien... Bisous
coucou
je vois que tes eleves vont user jusqu au bout!!!!!!!!
je te souhaite un bon dimanche
gros bisous
A zorro
Merci pour ta leçon d'orthographe. C'est toujours utile d'avoir un prof de français sous la main. Si tu permets, je ferai appel à toi quand j'aurai quelques incertitudes grammaticales.
Je te souhaite un bon dimanche.
Droit au coeur (valeur adverbiale donc invariable) . C'est sincère : ce qui caractérise La Bruyère , c'est l'universalité de ses portraits . Dans tes portraits , nous retrouvons tous nos élèves !
Bon dimanche .
Vivement les vacances !!
A zorro
Me comparer à La Bruyère et à Hitchcock, tes compliments me vont droit(s ?) au cœur.
Il faut que je me remette de mes émotions. Là, j’ai comme un blocage de la narration de cet événement…Je pense que lundi ou mardi ça ira mieux…
Je te souhaite un bon dimanche.
Alors, la suite !!!!
Passe un bon week-end.
Bisous.
quel classe que tu as dû supporter!!!!
passe une bonne nuit et bisous
Tu es le La Bruyère des portraits d'élèves !
Et le roi du suspense ... Est-ce :
-le mangeur de pizza étroitement enlacé avec "Elle" ?
- Le principal pris d'une soudaine crise de folie dansant le french cancan sur la table de réunion (ça s'est vu) ?
- Elle giflant l'abominable mangeur de pizza qui avait essayé de la peloter subrepticement et contre son gré ?
- Deux profs comparant la qualité de leur dentier ?
- La machine à café en panne ?(c'est un drame en salle des profs , surtout en juin)
- L'inspecteur qui vient te rendre une petite visite surprise sympa ?
- Une commerciale qui essaye de fourguer des bouquins d'art dont plus personne ne veut chez les profs (baisse du pouvoir d'achat et du niveau culturel obligent) ?
-
Prof83 , tu es cruel avec tes fidèles lecteurs ! Nous te sommons tous d'écrire la suite au plus vite ! (et elle a intérêt d'être à la hauteur ... ) Ou alors ..................................
ah les sales gosses!!!
courage à toi, encore une fois c'est bientôt les vacances, je prie pour toi qu'ils ne redoublent pas tous hihi ^^
je suis sur que tu l a vu elle avec ce fameux prof d italien !! lol
bon week end
me voilà ici.. toujours pas lavée je vais y aller mais j'ai un soucis avec ma chasse d'eau, je dois la remplir avec une bassine, lol.. et j'ai essayé de reparer mais en vain.. je suis un piètre plombier ! donc à l'ancienne... allez je vais plonger dans mon bain et me laver les tifs, le soleil est couché mais il ne pleut pas, gros bibi alain et bonne soirée flo.
C'est clair qu'on est des incompris, mdr... Surtout toi mon pauvre Prof.. Respect
félicitation pour le blog du moment... toi qui voulait fermer ce blog. Bon j'ai du retard, je lirai tranquillement tout ça ce soir. Bise bise
Hello,
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Je veux la suite ! Décidément il est bien sympa ce blog ^^
la suite ! la suite !
ben oui quoi, c'est pas correct ce genre de chute T_T
Ils sont encore tous là au mois de juin ! Alors là c'est clair que les élèves deviennent de pire en pire, à mon époque ils avaient le bon goût de disparaître après le conseil de classe.
Ces élèves vous en font vraiment baver, ils ont l'air insupportables, je ne sais pas comme vous faites pour tenir ! Courage ! Lhouria a raison, c'ets bientôt les vacances !
Coucou ! Ben qu'es-ce que t'as vu de si terrible ??? Bon et au fait, c'est quand les vacances ? Ben oui, faut bien que tu te reposes aussi !
Bonne jounée
Bisous