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Catherine (2).

Mireille me faisait la tête depuis que je lui avais raconté ma mésaventure à la pharmacie. Elle ne m'accordait plus que quelques baisers légers. Pas de « french-kiss », pas de baisers à genoux...Je lui dis que ce genre d'activité amoureuse ne nécessitait pas de préservatifs. Peine perdue, elle était têtue comme une mule et tous les hommes savent bien que quand une femme dit NON, hé bien elle dit NON ! J'ai tout tenté pour la faire devenir plus raisonnable : bouder moi aussi, faire semblant d'être malheureux en la regardant avec des yeux de cocker dépressif, la rendre jalouse... Rien n'y fit ! Elle avait la détermination de Roseline Bachelot lors de l'épidémie de grippe A (qui eut lieu bien plus tard). Mon taux de testostérone frôlant la saturation, je me mis à lorgner du côté de Liliane. Des bruits couraient dans le lycée, disant qu'elle achetait elle-même les préservatifs. C'est une fille comme ça qu'il me fallait ! Mais Liliane était une sacrée coureuse de marathon... Et à la limite, elle me faisait peur. Je dus donc me résoudre à errer du côté de la pharmacie, attendant une occasion propice pour aller faire mes achats amoureux. Il y avait beaucoup de va-et-vient dans ce lieu médicamenteux et je me disais in petto(1) : « mais ce n'est pas possible, tout le monde est malade dans cette ville » ! Pourtant, un mercredi après-midi, vers 14h30, je remarquai, qu'une femme venait d'entrer dans cette officine et qu'elle se trouvait seule à l'intérieur, servie apparemment par la belle Catherine. Le pharmacien était donc libre. Je pris mon courage à deux mains et pénétrai dans ce lieu aux relents de formol. Je suis du genre malheureux aux jeux, celui qui perd toujours...Et là, cette malédiction se vérifia encore une fois. J'eus droit à un petit regard en coin, innocent, de la part de la jeune fille en blouse blanche et je l'entendis murmurer: « Madame, je crois que c'est un orgelet, mais je n'en suis pas sûre. Je vais appeler mon père pour qu'il vous donne la pommade nécessaire ». Et elle appela son père. Et moi j'en voulus à cette cliente et à son orgelet qui me mettait dans la situation d'un G.I. américain, se promenant, la nuit, dans un souk de Bagdad en Irak. Catherine me demanda alors, comme l'autre fois : « Vous désirez Monsieur ? » Elle avait un regard moqueur et malicieux et une petite moue mutine qui me faisaient craquer. Moi, proche de l'apoplexie(2), je ne pus que dire : «  Heu, heu... » ! Ses yeux lançaient des flammes, elle était semblable à une louve qui avait enfin trouvé sa victime. « Pardon ? » me lança-t-elle, maintenant sûre d'elle-même, sûre de son pouvoir qu'elle allait exercer sur moi. Je me raclais la gorge en enrichissant mon vocabulaire : « Voilà, enfin, c'est que... » Elle tenta une plaisanterie qui ne me fit pas rire : « Vous avez déjà fini la boîte de pastilles Valda ? ». Elle se souvenait de tout, la friponne ! Comment me sortir de ces sables mouvants qui commençaient à m'engloutir ? Heureusement que j'avais été prévoyant, que j'avais imaginé cette situation. Mimant une extinction de voix (ça se tenait, puisque j'avais acheté des pastilles Valda),  je sortis de ma poche un morceau de papier sur lequel j'avais écrit :

Après avoir déchiffré mon écriture, elle m'acheva en me disant : 

« oui, mais de quelle taille ? »

1/ in petto: Expression italienne signifiant "à part soi", "intérieurement", "en secret".

2/ apoplexie : Coma soudain provoqué par une lésion cérébrale.

(A suivre...)