Mais oui, je suis un romantique !
Devais-je complètement cesser de penser à Serena ?
Son attitude, je dois bien l’avouer, me perturbait.
C’était comme du sel appliqué sur une plaie, du sel dont je me complaisais à saupoudrer cette brèche qu’elle avait ouverte dans ma peau, dans mon cœur. Alors, l’oubli devenait ma préoccupation essentielle, celle qui consommait mon énergie comme un moteur surpuissant glouton de super 98.
Le pire, dans cette affaire, c’est qu’à son abandon, se superposait une jalousie qui avait éclos lorsque j’avais vu Serena en compagnie de cet homme, l’autre jour, dans sa BMW de pacotille… On se dit, qu’avec les jours qui défilent, cette souffrance va s’atténuer. L’oubli cautérise* les blessures de l’âme, il s’allie au temps qui passe et qui se dilate pour éloigner tout ce qui nous fait souffrir.
A ces angoisses épidermiques incontrôlables par la volonté, viennent s’ajouter des raisonnements puérils, du genre : « Et si c’était son père ? » Ce qui revient à dire que ce qui fait souffrir, c’est plus la jalousie que l’abandon.
Comme un idiot, j’étais tombé amoureux d’une fille plus jeune que moi, qui m’avait harcelé au téléphone, pendant des semaines, au nom de la société Solido qui fabriquait des portemanteaux en bois exotiques. C’est que la seule nuit que j’avais passée avec elle, avait été, pendant des heures, un concert de jazz sensuel dans un jardin obscur et parfumé, une brise légère qui agitait quelques feuilles nostalgiques sur les branches des arbres, certainement centenaires. Et puis plus rien, comme si mon cœur devenait sourd, aveugle et muet, autrement dit, un handicapé sentimental.
Ma tendance naturelle, c’était l’inertie qui frôlait l’aboulie** pathologique et cela depuis ma plus tendre enfance. Ne rien faire économise l’énergie vitale et nous plonge dans une léthargie mentale qui agit comme un puissant narcotique.
J’allais faire un tour dans cette librairie mystérieuse, parfois fréquentée par celui que j’avais vu en compagnie de Serena. Le libraire, vieil homme d’un âge improbable, dont la femme, une chinoise, lui avait transmis une philosophie bien orientale, pouvait certainement m’aider dans ma recherche.
Je compris bien vite que cette philosophie-là était bien hermétique pour le cerveau d’un pauvre physicien amoureux d’une ombre. Bien entendu, il refusa de me communiquer le moindre renseignement sur ce monsieur au nom du « secret livresque » encore plus intransigeant, à ses dires, que le secret médical. Il se contenta de me conseiller de consulter « Anatomie du squelette humain », un livre, avec des dessins et des photos (heureusement) très instructif. Se moquait-il de moi ? Ou bien, me donnait-il une piste pour orienter mes recherches ?
En rentrant chez moi, plus déprimé que la bourse de Singapour, je décidais, en espérant ne pas m’endormir, de feuilleter cet ouvrage scientifique et cela me fit penser à Victor, le squelette du labo de SVT…
A suivre…
Notes :
*Cautériser : Brûler un tissu vivant avec un cautère afin de détruire les parties malades.
**Aboulie : Absence maladive de volonté, incapacité d'agir.
J'ai rêvé que je me battais contre Victor,
le squelette du labo de SVT, l'ex de Marina, peut-être...
(Vous suivez ?)
Le vieux libraire commençait à m’intriguer. Les livres qu’il m’avait donnés comportaient des titres qui cadraient bien avec ma situation actuelle : Marina et Serena. Lisait-il dans mes pensées ? Sa librairie était, en tout cas, un lieu bien étrange où le temps semblait s’arrêter.
Serena ne se manifestait plus depuis plusieurs jours et comme j’en avais assez du Cognac de Marina, j’aurais bien aimé goûter à son nectar au parfum de verveine…
Je n’aimais pas trop céder à cette tentation qu’une femme fait naître en nous et qu’elle entretient de manière sibylline, par son silence. Je lui téléphonais donc, un soir vers 22h, lorsque je sentais monter en moi cet ennui, vieille chaloupe du futur naufragé qui prenait l’eau. Je tombais sur sa boîte vocale dans laquelle je ne laissais aucun message. Je renouvelais mon appel vers 22h30 avec toujours le même insuccès. Peu à peu, Serena se transformait en fantôme aux contours mal définis. Avec le peu d’estime que je m’accordais, je pensais que ma performance sexuelle de l’autre nuit n’avait pas laissé dans son cerveau un souvenir impérissable. Heureusement que la libido de Marina fleurissait, à cette époque de l’année, comme des coquelicots dans un champ de luzerne. Chaque fois que je la voyais dans son labo, elle me vidait la tête et autre chose de 13h à 13h45, juste avant l’arrivée des élèves. Ce qui me gênait le plus, c’était la présence de Victor, le squelette voyeur qui semblait rigoler quand je me pâmais sous les coups de langue de la prof de SVT, la miss qui Soupèse Vos Testicules.
Un jour, ayant presque frôlé la pénurie de ce liquide RES (riche en spermatozoïdes), je lui demandais, comment, avec les maigres crédits qui nous étaient accordés, elle avait pu obtenir ce magnifique squelette en os réels qui devait valoir presque une petite fortune. Je pense qu’elle me fit un gros mensonge en me disant :
« C’est mon regretté mari qui me l’a offert pour mon anniversaire. »
« Drôle de cadeau », me dis-je en refermant ma braguette.
Et elle ajouta :
« C’est pour cela que je l’ai surnommé Victor en souvenir de mon époux décédé. »
La ficelle était vraiment dure à avaler, car moi je n’étais pas comme ELLE, une bouche qui ingurgitait n’importe quoi…
En sortant du collège, vers 14h30, je vis passer dans la rue, une BMW grise métallisée, dans laquelle se trouvait Serena en compagnie d’un homme pas très jeune, aux cheveux gris, qui conduisait. Etait-ce vraiment elle ou son sosie ? Ce qui était le plus étrange, c’est que je vis cette voiture souvent garée près de la fameuse librairie. Que me restait-il à faire ? Eh bien, je repris mon activité de « détective privé » pour essayer d’apercevoir le conducteur de cette puissante voiture allemande. Je le vis quelquefois, toujours seul, passer beaucoup de temps dans la librairie, comme pour se ressourcer. De toute évidence, ce monsieur devait aimer les livres...
A suivre…
1. causons le 29-10-2015 à 11:46:40 (site)
Tu as raison pour "gris métallisé", mais je vais laisser la faute.
Il a des critiques négatives et des critiques positives. Les tiennes sont 100% négatives.
Apparemment tu ne trouves rien de positif dans mes blogs. Je te conseille donc de ne plus venir me visiter.
C'est vraiment négatif d'être toujours négative.
Tu vois, moi, par déformation professionnelle, je ne critique jamais négativement les blogs des autres.
Le tien a peut-être des failles...?
___________________________________
C'est bien une preuve que je lis avec attention tes textes, mes remarques pour toi "négatives", ne le seraient pas pour moi, j'aimerais être lue avec cette attention et que l'on me corrige mes fautes, car bien certaine que j'en fais également...
Tu dois être un écorché vif, ou trop sensible avec un égo surdimentionné...
Mais ça aussi ça se corrige lol
Qu'attends-tu des gens qui viennent visiter tes écrits ?
Une appréciation sur ceux-ci toujours positive, un trait d'humour, ou qu'ils t'informent de la météo dans leur région ?
Je ne suis jamais négative dans ma vie de tous les jours, si tu juges que je le suis, libre à toi, mais c'est une erreur !
En tous cas, merci d'avoir confirmé que j'avais raison pour "Voiture gris métallisé" au moins je n'aurai plus aucun doute à ce sujet - Critique positive = Tu es trop fort !
T'es en vacances ?
Blanquette de veau, purée maison, salade verte et balade au soleil cette A-M
Bonne fin de journée, Alain ?
2. causons le 29-10-2015 à 17:28:53 (site)
Tu vois que tu es bon = critique positive n°1 -
tu sais écrire plus de 10 mots dans un com = critiques positive n°2, je ne suis qu'une vilaine chouette moqueuse, mea culpa lol
Le trompettiste de mes nuits d'insomnie...
Serena se faisait oublier : depuis quelques jours, je n’avais plus de nouvelles d’elle. Je m’étais promis de ne pas la rappeler, juste pour lui montrer que je n’étais pas quelqu’un de collant comme cette résine qui s’échappe des conifères. Je pensais qu’elle avait des problèmes et je regrettais presque l’époque des coups de téléphone de la société Solido. Je gardais dans un recoin de ma mémoire, le souvenir de cette première nuit passée avec elle, nuit de volupté intense, la première nuit, celle qui est la plus belle.
Je me rattrapais avec Marina, qui, à l’approche du printemps, avait une formidable éruption d’hormones. Elle me sollicitait tous les jours pour des bacchanales* plutôt malvenues dans son labo. Elle commençait par me servir, dans un bécher, du Cognac pour me donner des forces, prétendait-elle, un bécher que je soupçonnais avoir contenu au mieux des cœurs de grenouilles et au pire des limaces gluantes. L’alcool est idéal pour supprimer les barrières de la morale, mais absolument catastrophique pour la pratique du sexe. Imaginez un perchiste voulant sauter avec une perche molle…
Je retournai dans la librairie près du collège où il me sembla que le libraire avait rajeuni. Cette fois-ci, il me laissa tranquille et je pus flâner comme un papillon curieux dans les allées poussiéreuses de la librairie. Aucun livre n’attira vraiment mon attention et j’étais un peu gêné de quitter ce lieu sans n’en avoir acheté aucun.
Le vieux libraire me tendit un sac en plastique lorsque je passai devant sa caisse. Il m’apostropha :
« Je vous ai choisi deux livres. Lisez-les et vous viendrez les régler que s’ils vous plaisent. »
Un peu surpris par son attitude assez originale, je quittai la boutique en ayant encore la sensation que le temps s’était arrêté dans ce lieu si étrange.
Chez moi, après le diner, je m’affalai dans mon divan en espérant écouter un disque de jazz. Surtout, aucune lumière polluante dans mon salon, il me fallait cela pour apprécier la musique. Tous mes sens devaient se concentrer dans mes oreilles en attendant le temps où la musique pourrait se voir…
J’aimais passer la nuit ainsi, naviguer sur un océan de sensations sonores, me laisser bercer par des vagues invisibles aux fréquences si harmonieuses. Le temps semblait alors mener sa propre vie, comme un alcoolique sans logique baignant dans la déraison. C’est dire que le temps devenait schizophrène en malaxant les souvenirs au gré des notes d’une contrebasse ou des cris angoissés d’une trompette, hurlant comme un loup perdu dans la ville…
Fatalement, vers trois heures du matin, il arrivait que je m’endormisse, vaincu par les roulements trop saccadés d’une batterie devenue folle.
Vers six heures, en éclairant mon salon, je vis, sur ma petite table rectangulaire en verre, le sac en plastique que le libraire m’avait donné la veille. Il contenait deux livres intitulés :
- Marina de Carlos Ruiz Zafon,
- Serena de Ron Rash.
Quelle aurait été la probabilité pour que ces deux titres ne fussent que le fruit du hasard ? Pratiquement nulle !
Alors, qui était donc ce libraire qui ne vieillissait pas et qui connaissait le prénom des deux femmes qui perturbaient ma vie ?
A suivre…
Note :
* Bacchanale : sorte de fête tapageuse et débauchée.
1. anaflore le 06-10-2015 à 11:05:04 (site)
j'espère que les inondations ne sont pas passées chez toi????
bacchanales on apprend chaque jour peut être un rapport avec bacchus???
bonne continuation
2. causons le 29-10-2015 à 11:54:37 (site)
Ton "roman fleuve" me fait penser à des rêves avec suites chaque nuit, parraît-il que le sommeil est réparateur quand on rêve et qu'on se souvienne de ceux-ci...
3. causons le 29-10-2015 à 17:44:58 (site)
A la maligne.
Entre des appréciations toujours positives et des appréciations toujours négatives, il y a un juste milieu non ?
Je suis sûr que tu as fait exprès d'écrire " il parraît " au lieu de " il paraît ". Juste pour me faire réagir. Tu as gagné ! Quand je vois une faute pareille, j'ai mal au cœur, j'ai un malaise.
Tu as l'air de savoir cuisiner...
Bonne journée.
___________________________________
Non, pas du tout fais exprès, j'ai des lacunes de ce côté, je ne sais jamais quand quand on met double consonne, faudrait les connaître par coeur... hélas !
Le boulier du libraire.
( calculatrice sans pile )
Je sortis du labo, juste avant l’arrivée des élèves. J’espérais ne pas rencontrer une collègue qui aurait été tentée de me faire la bise. Mon visage, avec la douche bio qu’il avait reçu, n’était pas très présentable. Hélas, au bout du couloir, je vis apparaître Evelyne, elle aussi prof de physique, qui me fit un signe de la main en m’apercevant. Que faire pour l’éviter ? Devant moi, un élève de cinquième avançait en sens contraire en se chamaillant avec son camarade. Je m’arrangeai pour qu’il me heurtât et pour me mettre en colère quand il ne s’excusa même pas. Evelyne était presqu’à mon niveau et je la vis qui amorçait un mouvement pour m’embrasser. Je fis semblant de ne pas remarquer sa présence et je demandai à l’élève chahuteur son carnet de correspondance pour lui donner une observation écrite. Ma collègue s’éloigna discrètement, un peu gênée. Ouf, je l’avais échappé belle ! Devant moi, l’élève attendait, en espérant gagner le plus de temps possible pour arriver en retard à son cours avec une bonne excuse. C’était un petit rondouillard espiègle aux cheveux roux qui me regardait avec l’air de penser :
« Mais prenez votre temps, je vais arriver avec au moins quinze minutes de retard au cours de SVT ! »
C’est alors que je lui rendis son carnet en lui disant :
« Sauve-toi et surtout ne recommence pas ! »
Il avait échappé à une observation écrite et moi à la bise de ma collègue.
Je sortis du collège à 14h20 et pour ne pas entrer trop tôt chez moi, j’allais faire un tour dans une librairie un peu poussiéreuse, située à dix minutes de l’établissement.
Le libraire me regarda comme si j’étais un voleur. Mais qui irait voler un livre à notre époque ? Je me déplaçais dans les allées étroites qui délimitaient les rayons surchargés de livres probablement illisibles. Le libraire, inquiet, me suivait à distance, il n’avait probablement plus vu un client depuis des lustres (1). Sur une table, aussi ridée qu’une pomme avariée, quelques livres étrangers attendaient la délivrance. Je fus attiré par un roman de MO YAN, un écrivain chinois. Le titre un peu énigmatique, « Les treize pas », éveilla ma curiosité et instinctivement je me mis feuilleter l’ouvrage pour connaître un peu son style. Mais qu’avais-je fait ? Le libraire se précipita sur moi, l’air furieux, comme si je voulais violer sa femme (probablement centenaire). J’eus juste le temps de lire qu’il était question de professeurs de physique dans la Chine des années quatre-vingts. Je jure que je ne me plaindrai plus car être professeur en France est un paradis en comparaison de la vie d’un enseignant chinois au temps de Mao Tsé Toung. Pour calmer l’angoisse du libraire probablement au bord de l’apoplexie (2) et de la faillite, je lui dis, en lui tendant le livre :
« Je l’achète, je l’achète ! »
Il me regarda comme si je parlais en hindoustani (3) et répliqua :
« Je vous avertis, je n’accepte ni les chèques, ni les cartes bancaires ! »
Pour le provoquer un peu, je lui dis :
« Vous acceptez les ‘yuans’ (4) ? »
Il devint aussi rouge que lors de sa nuit de noce, il y a longtemps, longtemps…
« Suivez-moi ! » me dit-il et il me conduisit vers la caisse où trônait une machine d’un autre temps. Il ouvrit un tiroir et sortit un boulier japonais en ivoire. Sa main parcheminée jongla avec les boules à la vitesse d’un cheval au galop et il m’annonça :
« Ça fait 63 yuans ! »
Devant ma mine effarée, il me dit :
« Vous n’avez pas de chance, jeune homme, car je suis marié avec une chinoise ! »
Il eut alors un soupir nostalgique et le regard languissant d’un français amoureux d’une asiatique. Il me dévisagea avec un sourire moqueur et me confia :
« Je vous ai fait peur, hein ? Ici le temps ne passe pas très vite et je m’ennuie souvent. Il n’y a pas beaucoup de clients et je suis vieux, très vieux. Je ne vous dirai pas mon âge car vous ne croiriez pas… »
Moi, je lui donnais dans les quatre-vingts ans. Quand je lui fis part de mon estimation, il se mit à rire avec des soubresauts de puce agonisante. Il répliqua :
« Vous êtes loin du compte jeune homme ! Et ça fait huit euros pour le livre ! »
Je n’avais pas la force de quitter cette librairie. J’y étais entré à 14h30 et il était…
« Encore 14h30 ? Zut ma montre s’est arrêtée ! »
Le libraire me poussa vers la sortie en me saluant :
« Au-revoir Monsieur le professeur de physique et inutile d’aller faire réparer votre montre. Elle redémarrera dès que vous serez sorti ! »
Effectivement, ma montre se remit à vivre au contact de l’air de la rue et je constatais avec effroi que le temps s’était arrêté pendant trente minutes dans cette librairie…
A suivre…
Notes :
1- Lustre : période de cinq ans.
2-Apoplexie : accident vasculaire cérébral pouvant entraîner une paralysie partielle ou totale. (AVC)
3- Hindoustani : linguistique. Mélange d'ourdou et d'hindi occidental qui se répandit dans toute l'Inde du XVIe au XVIIIe siècle.
4- Le yuan ou renminbi (littéralement : « la monnaie du peuple ») est la devise nationale de la Chine à l'exception de Hong Kong et Macao. Le yuan est l'unité de compte, et le renminbi la monnaie réelle.
Serena sous la douche.
Je me levais à mon tour et je passais devant la porte de la salle de bains. On entendait couler l’eau de la douche, mais aussi la voix de Serena qui semblait parler dans son portable. A qui s’adressait-elle de si bon matin et pourquoi ? Par pure curiosité, je collai mon oreille sur la paroi en bois peinte en blanc. J’avoue que je n’entendais pas grand-chose, mais je crus discerner quelques mots noyés par l’eau qui coulait dans la cabine de douche et qui allait se perdre dieu sait où. Seuls deux prénoms parvinrent à mes oreilles, deux prénoms comme sauvés d’un naufrage : Alain (le mien) et Marina. Pourquoi diable évoquait-elle le prénom de la prof de SVT, femme de feu-Roger ? Lorsque l’eau cessa de couler, je m’éloignai de la porte et j’allai dans la cuisine pour préparer du café. Serena m’y rejoignit quelques minutes plus tard et refusa la tasse de boisson chaude que je lui offrais.
« Je suis pressée, j’ai beaucoup de boulot aujourd’hui » me dit-elle en gardant ses distances, comme pour éviter de m’embrasser en partant. Je captais son signal muet et je restais assis quand elle ajouta :
« Je file, ne te dérange pas, je connais le chemin ! »
Tout cela me mit mal à l’aise et je me mis à réfléchir sur ce qui avait pu lui déplaire en moi. N’avais-je pas été à la hauteur sexuellement ? C’est la première pensée qui vint tarauder (1) mes neurones. De plus elle ne promit pas de me téléphoner pour garder le contact. J’avais l’impression que pour elle, cette nuit passée avec moi, n’était qu’un remerciement pour un service que je lui avais rendu.
En tout cas je décidais que je ne serai pas le premier à appeler.
Je traînais chez moi jusqu’à dix heures, c’est à ce moment-là que mon téléphone se manifesta. C’était Marina qui voulait absolument me voir. Que faire ? J’imaginais ce qu’elle attendait de moi dans son labo, mais me restait-il assez d’énergie pour la satisfaire ? J’imaginais la greffe d’une deuxième paire de testicules pour répondre à la demande… Ah ces femmes, toutes des goules (2) pour nous les hommes, pauvres reproducteurs aux engrais limités…
13h30 : c’était l’heure du rendez-vous de la débauche dans le labo de Marina qui me reçut en se collant à moi et en plaquant sa bouche, véritable aspirateur « Tornado », sur la mienne. Mais il fallait beaucoup plus que ça pour ranimer une braise qui ne brillait que par son absence, un soleil en fin de vie ayant épuisé ses réserves d’hydrogène pour se transformer en « géante rouge » (3), une grosse étoile prétentieuse qui ne pouvait pas grand-chose.
Je lui dis, pour plaisanter un peu :
« Tu as envie de ma géante rouge, ma chérie ? »
Elle tâta rapidement ma braguette et répliqua :
« Dis plutôt, une naine blanche (4) ! » Et elle éclata de rire.
Nous divaguions sur des sujets d’astronomie et cela me faisait gagner du temps car les élèves n’allaient pas tarder à arriver.
Elle devint brutalement salace, ce qui me choqua profondément :
« Tu peux me lécher un peu, puisque tu ne veux pas me baiser ! »
Je pouvais faire ça pour elle, ma langue était encore en état de fonctionner, mais je rêvais quand-même à la langue bifide (5) des serpents.
Elle s’installa sur la paillasse en céramique blanche, cuisses écartées et moi j’espérais bien que mon visage ne reçût pas de douche tiède et gluante. Hélas, elle joua bien son rôle de femme-fontaine ! Je fus quitte à aller me laver la face sous le filet d’eau froide du robinet de l’évier à l’odeur forte de formol. Je commençais à m’habituer aux cadavres de grenouilles et de souris qui me narguaient dans leurs bocaux, mais je ne sais pas pourquoi, Roger-le-squelette me faisait froid dans le dos…
A suivre…
Notes :
1- Tarauder : préoccuper vivement (soutenu).
2- Goule : femme insatiable de lascivité.
3- Géante rouge : Étoile en fin de vie, dont le volume s’est énormément dilaté (une centaine de fois le diamètre du Soleil) et dont la surface s’est refroidie (en prenant cette teinte rouge caractéristique des basses températures pour les étoiles).
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4- Naine blanche : La naine blanche est l'ultime étape d'un soleil. Après la phase de géante rouge, il ne reste plus rien à brûler, mais son cœur demeure très chaud, d'où sa couleur blanche. La naine blanche est probablement composée d'oxygène et de carbone, sa pression est énorme, plus petite que la terre, mais d'une masse supérieure à celle du soleil.
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5- Langue bifide : C’est une langue présentant deux extrémités séparées. Encore appelée langue fourchue, elle est le symbole du diable et du mensonge.
En me faisant goûter un morceau de tarte à la rhubarbe enduit de sa salive, Serena me donnait la clé qui ouvrait le portail en fer forgé du jardin des voluptés. Son jardin, que j’avais survolé, mais que je n’avais pas encore exploré, offrait-il des allées pleines de ronces ou des haies parfaitement taillées, des fleurs sauvages ou bien des roses parfumées, des fontaines muettes ou des boutons chargés de buée ? En bon jardinier, je me devais de vérifier que toute cette végétation ne souffrait pas de sècheresse. Et quoi de plus pratique que la main pour m’assurer que les perles de rosée étaient bien présentes dans les broussailles, même les plus cachées.
En aveugle, ma main droite remonta l’allée aux contours charnus, les cuisses à la peau douce, satin vivant et chaud et aboutit à une sorte de grotte dont l’entrée était masquée par un rideau de hautes herbes, drues et humides. Mes doigts prirent alors un bain d’essences gluantes et parfumées et leurs mouvements dans la conque fendue firent naître chez elle, une douce mélodie de clapotis languissants. C’est alors que commencèrent les murmures assoiffés des sirènes. Serena soupirait et émettait des sons qui ressemblaient à des prières, à des plaintes, à des psalmodies (1) qu’on n’entendait plus que dans les cathédrales gothiques. Ma main s’enhardissait sur ses muqueuses humides comme celle d’un vieux violoniste sur les cordes fatiguées d’un Stradivarius (2) d’un autre temps. Mes doigts se firent fureteurs, explorateurs de la caverne humide des femmes écartelés pour le plaisir du mâle. A présent, Serena se contorsionnait, à la recherche d’un point d’appui, d’un support dur et stable. Elle trouva en moi, une colonne de chair, un pic coriace et doux comme du silex qui ne demandait qu’à faire des étincelles…
Etait-il encore question d’amour ? N’était-ce pas plutôt cet appel qui venait du fond des âges, cet instinct qui réunissait, pour la pérennité(3) de l’humanité, deux sexes différents créés pour s’emboîter l’un dans l’autre, avec accessoirement, du plaisir ?
Nous quittâmes le canapé pour aller voguer sur les flots, allongés sur le radeau des temps modernes : le lit. Sa bouche remplaça sa main pour tailler le silex qui gardait sa dureté et acquérait une ductilité(4) variable. Il y avait dans cet acte si intime de la femme, toute son envie de dévorer l’organe mâle pour s’approprier sa fougueuse puissance.
On en était arrivés à un stade où le danger n’était plus qu’une conception virtuelle et on avait décidé de ne pas revêtir d’armure pour se protéger contre des envahisseurs invisibles et tueurs.
Serena m’offrit son autre caverne, celle des mystères de la vie et de la descendance. Mon silex allait à jamais, graver sur ses parois de chair une partie de mon génome (5). L’élasticité du temps rendait sa mesure imprécise. Il arriva qu’à un certain moment, mon cerveau donnât l’ordre au silex, de faire jaillir de la fissure située à son extrémité, une source chaude et vivante, dont les saccades inondèrent la caverne. Les dés étaient jetés et le hasard entamait sa mélodie…
Qu’allait-il advenir de notre combat ?
Serena redevint ELLE en me disant :
« Excuse-moi, mais je dois aller dans la salle de bains ! »…
A suivre…
Notes :
1-Psalmodie : manière particulière de chanter et de réciter les psaumes sur une seule note et sans inflexion de voix, dans les religions juive et chrétienne.
2-Stradivarius : violon, alto ou violoncelle d'une qualité exceptionnelle, fabriqués par le luthier italien Stradivarius.
3-Pérrenité : caractère durable ou continuel (de quelque chose).
4-Ductilité : propriété de pouvoir être étiré sans se rompre.
5-Génome : ensemble des gènes d'une cellule ou d'un organite cellulaire.
1. Eliot le 17-09-2015 à 13:59:16
toujours aussi passionant.CONTINUER !
Serena et moi...
Décidément, je n’arrivais pas à résister aux charmes de Marina, femme-vampire, bien inspirée avec ses lèvres, femme-pompier ou femme-pompiste qui allumait des feux, femme-pyromane capable de vider des citernes entières de liquide un tant soit peu poisseux.
J’espérais que Serena, plus jeune, elle avait vingt-cinq ans, et donc moins expérimentée, fût un peu plus fragile, une fleur-bleue romantique à la larme facile…
Serena sonna à ma porte vers 19h30.
En entrant, elle me tendit une boîte de gâteaux qui fit grimper sa note de deux ou trois points. C’était une première visite chez moi, assez compliquée à gérer, vu que jamais, je n’avais exprimé ce que je ressentais pour elle, je l’avais seulement aidée avec des conseils qui me faisaient jouer plus un rôle de psychiatre que de séducteur. Finalement, assez timide, je voulais qu’elle comprît, avec mes regards-scanners-baladeurs, sur son corps, que je n’étais qu’un être-mâle sans mal-être et que je mettais à sa disposition ma libido florissante contenue finalement dans un endroit bicéphale qui n’avait rien à voir avec mon cerveau.
Elle était assise en face de moi et donc j’étais privé du rayonnement thermique de sa peau, mais pas de la vision de ses belles cuisses qui révélaient un galbe freudien, sous une jupette à proscrire dans les couvents espagnols.
Je lui fis un récit des derniers événements concernant les soupçons que je portais sur Marina, en ayant soin de bien gommer toutes nos "dérives" dans son labo du collège.
En gros, je pensais que ma collègue de SVT avait assassiné son mari, qu’elle avait laissé croire qu’il avait péri dans l’incendie de son usine de portemanteaux, pour qu’on ne cherchât pas son cadavre et qu’elle avait récupéré son squelette qu’elle avait transporté dans son labo, en pièces détachées certainement. Ce squelette s’appelait Roger (comme feu son époux) et je ne révélais pas qu’il assistait « religieusement » à nos séances de « jambes en l’air » sur la paillasse carrelée du labo, parmi les flacons de produits chimiques et les cadavres de grenouilles, de souris, de serpents conservés dans des flacons remplis de formol.
J’expliquais aussi comment j’avais pensé à des analyses ADN pour prouver que le squelette du labo n’était autre que celui de Roger, feu le mari de Marina.
Pendant mon petit discours, que j’abrégeais sur la fin, j’observais Serena et je remarquais qu’elle ne réagissait pas du tout, certainement tétanisée par mon exposé magistral. Il était évident que la victoire ne serait pas facile et que l’ascension du mont-volupté serait longue et périlleuse. Je lui offris une coupe de champagne et je lui tendis le plat sur lequel j’avais disposé ses petits gâteaux. Elle choisit une tartelette à la rhubarbe qui me fit comprendre que ce n’était pas gagné. Moi, j’hésitais entre un mille-feuilles ventripotent et un éclair au chocolat plutôt maigrichon. Serena eut un petit sourire et me dit :
« Tu n’aimes pas les tartelettes à la rhubarbe ? »
Un peu gêné, je lui répondis :
« Non, je n’aime pas ça, mais j’avoue que je n’y ai jamais goûté ! »
Son regard devenait un peu plus pétillant ; un effet du champagne peut-être ? Elle essaya de me convaincre :
« Tu devrais essayer ! »
Mais comment ? Il ne restait plus, heureusement pour moi, de tartelette à la rhubarbe. Alors elle me dit :
« Viens près de moi, je vais t’en faire goûter ! »
Un peu perplexe, mais ravi, je m’asseyais à côté d’elle. Elle se pencha vers moi et m’embrassa sur la bouche en y poussant avec sa langue un morceau de tartelette enduit de sa salive. C’était vraiment dégoûtant, mais cela provoqua en moi un réveil de ma testostérone qui fit pousser un menhir entre mes jambes.
Alors, je me permis de mettre ma main entre ses cuisses…
A suivre…
Imaginez:
Marina et moi...
Marina dégusta avec une évidente satisfaction, mon débordement d’amour.
Elle était de plus en plus excitée ; cela se voyait au niveau de ses tétons qui avaient presque troué son chemisier. Ils me semblaient énormes et déformaient le tissu qui souffrait en silence. Moi, j’avais hâte de partir, hâte de quitter le labo pour préparer ma soirée avec Serena. Mais ma jolie collègue me fit comprendre que je n’en avais pas encore fini avec elle. Je voulais garder quelques munitions pour l’éventuelle périlleuse nuit que je pourrais passer avec Serena.
Elle s’assit sur la paillasse et releva sa jupe, dans une position qui aurait enroué un ténor de la Scala. L’angle de ses cuisses frôlait les 160 degrés, un écart considérable qui aurait pu provoquer une luxation (1) au niveau du col du fémur. Marina me faisait peur avec ses yeux de succube (2). Sa voix un peu gutturale (3) me lança un ordre qui ne souffrait aucune discussion :
« Minou, viens laper ta maîtresse ! »
A vrai dire je n’aimais pas trop explorer, avec ma langue, ces grottes biologiques, mais je lui devais bien ça. Je me retrouvais accroupi entre ses jambes regardant presque avec dégoût quelques stalactites (4) roses qui semblaient fondre et laisser couler, au goutte à goutte, un liquide opalescent qui n’avait pas le goût du sirop d’érable. Mais deux minutes plus tard, je crus qu’elle voulait m’assassiner, car ses jambes, étau de chair, se refermèrent violemment sur ma tête, comme pour m’étouffer ou me décapiter. En même temps, elle poussa un cri qui dut être entendu dans la salle des professeurs et aussi dans le bureau du principal. J’étais gêné, car son orgasme arrosa mon visage d’une buée gluante : j’ignorais que Marina fût une femme-fontaine !
Et Roger, le squelette, qui nous regardait, ne broncha pas.
Elle en voulut encore, mais moi je dis « STOP » ! Je voulais réserver le reste de mon capital séminal à Serena, en supposant qu’elle fût d’accord. Pendant que j’essuyais mon visage avec du papier filtre douteux, trouvé sur la paillasse près d’un bac en plastique contenant huit cuisses de grenouille baignant dans du sérum physiologique, Marina se colla à moi dans un moment de tendresse, étonnant chez elle. Parfois, certainement à cause de ses hormones capricieuses, elle retrouvait la douceur et la faiblesse des femmes comme je les aimais. Je me penchais au-dessus de l’évier en faïence blanche qui contenait huit béchers avec un agitateur et une micropipette, pour me rincer le visage. Une forte odeur de formol s’insinua dans mes narines et vint taquiner mes amygdales ; une odeur caractéristique des endroits où l’on conserve des cadavres, ici de grenouilles.
Il était 13h50 et les cours allaient commencer. Je profitais d’un moment de faiblesse de Marina pour lui reposer toujours la même question :
« Mais pourquoi ce squelette s’appelle Roger ? »
Je ne m’attendais à aucune réponse et pourtant elle me dit :
« Ce squelette m’a été offert par Roger, mon regretté mari ! Les crédits que l’on nous attribue en SVT ne sont pas suffisants pour en acheter un ».
C’était une justification bancale, mais cela pouvait expliquer pourquoi, au moment de l’orgasme, elle criait toujours:
« Roger, oh, Roger !» …
A suivre…
Notes :
1- Luxation : déplacement des os d'une articulation
2- Succube : démon qui, selon des croyances populaires, prend la
forme d'une femme pour séduire les hommes durant leur sommeil.
3- gutturale : rauque, qui a rapport au gosier.
4- stalactite : concrétion calcaire en forme de colonne qui descend de la voûte des cavités souterraines.
Avec Marina, j'aurais aimé être un eunuque,
de temps en temps...
Le lendemain matin, je filai à la poste pour envoyer à mon ami de Marseille, les prélèvements d’os et de poils appartenant apparemment à Roger, feu le mari de Marina. Les résultats seraient longs à obtenir car la filière utilisée pour l’analyse ADN n’était pas tout à fait officielle.
J’eus toute la journée pour préparer ma rencontre avec Serena. Comme un parfait homme de ménage, j’astiquais de fond en comble mon appartement et je changeai les draps de mon lit, au cas où elle succomberait à mon charme fou…Le jour tant attendu était enfin arrivé. J’avais maintenant une vision assez claire de la situation et je comprenais enfin les liens qui existaient entre les différents protagonistes de cette pénible affaire.
La réaction brutale de Marina concernant son aversion pour les visages légèrement barbus, m’arrangeait finalement et je décidai de ne plus aller la voir. A 10h30, la sonnerie du téléphone me tira d’une léthargie bienfaitrice qui m’aidait à compenser mes insomnies nocturnes. Le nom de Marina apparut sur l’écran de mon combiné. Je ne décrochai pas. L’appel fut répété une dizaine de fois jusqu’à onze heures. Finalement, excédé, je me décidai à répondre pour lui signifier une rupture définitive. A l’autre bout du fil, Marina pleurait. Je ne savais plus quoi faire ; j’avais le cœur sensible et les neurones généreux. Elle voulait absolument que j’allasse la rejoindre dans son labo pour tout m’expliquer, disait-elle. Que faire ? J’acceptais finalement de la rencontrer pour percer cet abcès qui grossissait et qui devenait douloureux pour nous tous. Elle me remercia mille fois ; ce n’était plus la Marina, forte et hautaine que je connaissais, mais je me méfiais quand même, connaissant la perfidie de certaines femmes. Pour lui montrer que tout était fini entre nous, je ne rasais pas mon visage pour qu’elle n’eût pas de tentation sexuelle envers mon corps d’apollon (1).
A treize heures, j’étais dans son labo. Elle était gênée et malgré ma petite barbe, elle colla sa bouche sur la mienne. Je voulus, immédiatement, la repousser, mais j’attendis deux secondes de trop. Deux secondes, c’était le temps nécessaire pour que se mît en marche tout un processus hormonal qui aboutit à une raideur que je ne parvenais plus à contrôler. C’est qu’en même temps, je sentais sur ma poitrine, les seins de Marina, que j’avais déjà entrevus en arrivant, grâce au décolleté généreux de sa blouse blanche, qu’elle avait diaboliquement entrouverte. J’eus une pensée émue pour Adam, le pauvre, incapable de résister à Eve. C’est que, pour m’achever complètement, elle glissa sa main entre nos deux ventres collés, pour tâter, en experte, ce qui n’était plus une molle quenelle. J’étais perdu, avant que de combattre (2).
Je ne sais pas pourquoi, les femmes aiment tant s’accroupir devant un homme. C’est ce que fit Marina. Moi, j’étais déjà dans un autre monde, noyé dans de la barbe à papa parfumée au sirop d’érable. Je sentis mes jambes se ramollir et une vibration naquit dans mes talons, pour se propager vers mes cuisses et aboutir violemment dans ce magnifique organe que n’ont pas les eunuques (3). La lance d’incendie projeta par saccades, dans sa bouche, un élixir gluant précurseur de la vie…
Roger, le squelette, nous regardait. Je l’avais oublié celui-là !...
A suivre…
Notes :
1 : Apollon: très beau jeune homme.
2 : « Avant que de combattre ils s'estiment perdus. »
Le Cid (Acte 4, Scène 3) de Pierre Corneille.
3 : Eunuque : Homme qui a été castré. Autrefois, gardien du sérail, d'un harem.
1. La Rousse le 27-08-2015 à 19:39:10
Bonsoir... Alain ?
Dis voir, toi tu n'a pas ton cerveau dans ton slip, mais un sexe à la place du cerveau...
J'avais lu un article qui disait qu'un homme pense au sexe, en moyenne toutes les 28'mn, vas y mon pote, t'es bien dans la norme lol
Nostalgie: Christiane et moi,
il y a quelques années.
(J'espère qu'elle ne lira pas mon blog).
Dans la salle de bains, je repérai bien vite la tablette en verre suspendue à un mur. Elle supportait un rasoir électrique, d’une apparence neuve et de marque Philips. Je redoutais que Marina ne l’eût nettoyé de fond en comble. A droite du lavabo se trouvait une boîte de mouchoirs en papier, côtoyant, dans un désordre minutieux, des tubes de crème hydratante, un shampooing antipelliculaire et un petit flacon de parfum Shalimar de Guerlain. Je fus plongé un instant dans un bain de nostalgie et j’en vins à oublier ma « mission ». Shalimar, c’était le parfum de Christiane, une femme que j’avais connue et aimée, il y a bien des années. Elle représentait l’époque des « amours parfumées ». Elle était veuve, brune, piquante et son tour de poitrine, 95B, me faisait rêver. Pour me faire souffrir, je dévissais le bouchon du flacon arrondi et alors, jaillirent vers mon nez, des milliards de molécules odorantes, qui, un instant, me firent voyager dans le passé. Notre « histoire » finit mal…
Je secouais ma tête, comme un chien qui s’ébroue, pour revenir à mon présent. Minutieusement, je démontais le haut du rasoir électrique et sur un mouchoir en papier, je secouais l’appareil pour en faire tomber les poils de la barbe de Roger. « Bingo ! », il y en avait beaucoup. Je pliais en quatre le mouchoir et je le glissais dans la poche de mon pantalon. Après avoir tout rangé, je regagnais le salon où m’attendait Marina.
« Tu en as mis du temps ! » me reprocha-t-elle.
Et en même temps, sa main caressa ma joue.
« Oh, mais tu ne t’es pas rasé ! » cria-t-elle.
Presque craintif, je balbutiais une excuse :
« Tu sais, les rasoirs électriques me donnent des boutons. »
Elle devint comme folle. Elle eut une réaction disproportionnée :
« Mais tu te fous de moi ! Dégage, dégage ! » hurla-t-elle.
Apparemment, elle avait un problème grave avec les poils masculins. Cela me rappela une élève que j’avais eue il y a bien longtemps et qui avait un orgasme chaque fois que je parlais de poils (heureusement pas très souvent).
J’avais l’impression d’avoir devant moi, une furie (1) échappée d’un asile d’aliénés et je pensais à ce que devait subir le pauvre Roger, feu son mari… Elle me désigna la porte avec son index droit, qui se transforma, dans mon imagination, en une épée acérée. Je sortis bien vite, comme rassuré d’avoir échappé à un danger mortel. Chez moi, je téléphonais à mon ami de la fac des sciences de Marseille pour l’informer que j’avais récupéré deux échantillons pour l’analyse ADN : la poussière d’os du squelette et les poils de barbe de Roger. Il me demanda de tout lui envoyer en recommandé. Puis j’entrais en contact avec Serena (celle qui avait incendié l’entreprise des portemanteaux Solido) pour tout lui raconter. Elle me parut inquiète et angoissée. Je lui proposais de venir chez moi le lendemain et je mis une bouteille de champagne « Veuve Clicquot » dans le réfrigérateur…
A suivre…
Notes :
1 :Antiquité : chez les Romains chacune des trois divinités vengeresses de la mythologie latine.
• les furies rendaient fou celui qu'elles poursuivaient.
• les furies avaient des serpents en guise de cheveux.
Marina et moi version soft...
J’avais donc prélevé de la poussière d’os sur le tibia de Roger, le squelette, qui se trouvait dans le labo de Marina. Mais pour savoir, par un test ADN, si c’était bien celui de son mari, je devais chercher des indices lui ayant appartenu de son vivant.
Je me pointais, peu rassuré, chez Marina vers vingt heures. Décidément, de jour en jour je découvrais des facettes peu rassurantes de sa personnalité. Je savais qu’elle était érotomane et certainement aussi nymphomane et manipulatrice, mais je pensais à présent, qu’elle était, en plus, criminelle. Sa maison devenait pour moi, inquiet professionnel, un lieu hautement improbable.
Quand elle ouvrit sa porte, j’oubliai, un instant, que j’avais affaire à une dangereuse psychotique ; je la trouvais belle et sexy et déjà je salivais en pensant à la nuit que j’allais passer avec elle. Elle m’accueillit avec un baiser sur la bouche, un de ces baisers plus chaud que l’Etna, avec une langue aussi agile que les sabres des soldats napoléoniens. Elle savait provoquer en moi, une tension palpable aussi dure que du vieux bronze chinois et mettre en marche la machine qui fabriquait ma lave bouillonnante et prête à jaillir. Bref, elle me « tenait » par le sexe !
Elle était assise à côté de moi, sur le canapé, et sa belle cuisse découverte me transmettait déjà la chaleur de son corps. J’en perdais mes repères et j’oubliais alors ma « mission » et ses dangers. Elle me proposa un apéritif, whisky, pastis ou martini. Je choisis le moins fort pour garder des neurones à peu-près présentables. Sur la petite table basse en verre, en face de nous, elle avait garni des petites assiettes avec des soufflets à la cacahouète, des noix de cajou et des crackers au fromage. Tout ce que j’aimais ! Mais derrière mes sourires de façade, je cherchais où je pourrais trouver, dans cette maison, des traces biologiques de Roger. Cela ne m’empêchait pas de faire voltiger ma main un peu partout sur son corps. Elle se laissait faire, en gloussant comme une nymphe timide. Entre deux gorgées d’apéritif et deux crackers Belin, elle m’avoua que pour oublier le drame, elle avait jeté toutes les affaires de Roger et même ses lettres d’amour. Les pistes s’effilochaient une à une : la salive sur les enveloppes, les cheveux sur les vêtements…etc.
Je me demandais alors si cette soirée était vraiment une bonne idée. Un peu quand même, oui, car sa main avait commencé un travail minutieux sur mon archet si sensible qui n’attendait que cela : frotter les cordes du violon de Marina… Un violon qui chuintait des mélodies peu catholiques à ne pas faire écouter à des oreilles chastes. Par un hasard, programmé par le destin, Marina caressa mon visage et s’exclama :
« Oh, tu ne t’es pas rasé ! Je déteste ça ! »
C’est vrai que j’avais une petite barbe de deux jours qui se voyait à peine. Mais Marina, têtue comme une mule ménopausée, ne voulut plus continuer nos petits jeux coquins.
« Il faut te raser ! » me dit-elle avec un air dégoûté .
Une lubie de plus à ajouter aux exigences de Marina qui en avait déjà beaucoup. Ma libido commençait à prendre l’aspect d’une glace à la vanille qui fondait au soleil et mon archet acquérait la mollesse des élastiques en caoutchouc des îles. Je trouvais là une occasion de fuir :
« Bon, puisque tu l’exiges, je retourne chez moi pour me raser ! Je reviendrai dans une heure si tu le souhaites. »
Marina répondit :
« Idiot, tu n’as qu’à aller dans la salle de bains et te raser avec le rasoir électrique de Roger que j’ai gardé en souvenir ! »
Marina ne se doutait pas qu’elle venait de commettre une erreur fondamentale…
A suivre…
Commentaires
1. anaflore le 25-10-2015 à 21:34:31 (site)
bonnes vacances