posté le 17-01-2014 à 07:17:33

Grasse (71).

Deux manières de perdre la tête...
 

 

Quand mon regard effleura le portrait de Lavoisier punaisé sur le mur au-dessus de l’évier, j’eus donc comme un éclair de clairvoyance, comme si, ce malheureux chimiste, depuis l’au-delà, m’avait envoyé un code secret qui allait me permettre de comprendre pourquoi Monsieur Ladérovitch, l’homme sans mémoire, avait prononcé le mot « téléphone » en regardant la photo de Lola.

Pourquoi cette aide venue du lointain passé ?

Lavoisier fut guillotiné lors de la Terreur à Paris le 8 mai 1794, à l'âge de cinquante ans, considéré comme traître par les révolutionnaires.

Alors quel lien unissait ce célèbre chimiste à Monsieur Ladérovitch ? Hé bien, on peut dire que tous les deux avaient perdu la tête, l’un par la guillotine et l’autre à cause de la maladie d’Alzheimer.

Quand on décroche son téléphone, on commence par dire « allo » et il se trouve que « allo » n’est autre que l’anagramme* de « Lola ». Ce qui semble signifier qu’en disant « téléphone », Monsieur Ladérovitch « pensait » en fait à Lola. Drôle de détour pour exprimer sa pseudo-pensée ! Ce qui était encourageant, c’était qu’il y avait peut-être un moyen de communiquer avec une personne atteinte de la maladie d’Alzheimer. Mon malheureux voisin avait assisté au rapt de Lola par le gang des « parfumeurs grassois » et il avait certainement entendu quelques phrases prononcées par les ravisseurs.

Tout cela allait m’obliger à « embêter » encore Monsieur Ladérovitch, encore fallait-il que je le rencontrasse. Il errait souvent dans l’immeuble, dans les couloirs, dans les coursives et même au sous-sol près des nombreuses caves parfois mal fermées. Il y avait aussi les locaux à poubelles et aux deux roues qu’il appréciait tout particulièrement.

Il fallait aussi que j’évitasse le plus possible Monsieur Gédebras qui aimait se promener dans tout l’immeuble avec sa mine de défroqué sadique. Madame Coqualo, elle, fréquentait assidûment le local à poubelles en vue de satisfaire ses pulsions labiales et son goût immodéré pour cette liqueur tiède, blanche et sirupeuse que l’on pourrait qualifier de cent pour cent bio, issue de l’appendice dressé d’un mâle en extase…

Quant à moi, je cherchais une occasion favorable pour rencontrer Monsieur Ladérovitch, le fantôme de l’immeuble. Je savais bien qu’il aimait se réfugier (par hasard) dans le local à vélos où il semblait trouver un semblant de sécurité. C’est comme cela, qu’un après-midi, vers 16h10, après avoir affronté les multiples dangers du lycée, je décidai d’aller faire un tour dans la petite pièce du rez-de-chaussée pleine d’objets hétéroclites allant des vélos  aux landaus en passant par des bidons métalliques parallélépipédiques rouillés et pleins de substances odorantes et plutôt inquiétantes. C’est là que je retrouvais mon voisin à la mémoire effacée, sommeillant, assis par terre contre le vélo de course de Monsieur Gédebras.

Il ne dormait que d’un œil, l’autre lui servant à détecter la présence des nombreux démons cornus aux pieds fourchus qui le poursuivaient sans cesse. Il eut l’air de me reconnaître à moitié en contractant ce qu’il lui restait de muscles qui apparaissaient sous la peau fripée de ses bras nus.

Une nouvelle fois je lui montrais la photo du visage de Lola. Rien aucune réaction ! Son état psychique s’était-il, en si peu de temps, dégradé à ce point? J’allais partir, aussi déçu qu’une abeille bannie de sa ruche, quand j’eus l’idée saugrenue de lui tendre la photo en plan large de la partouze où Lola s’adonnait, nue, à des activités plus que charnelles. Une petite LED blanchâtre et coquine s’alluma dans son œil mort et il s’esclaffa :

- bokama, bokama !

Que voulait-il dire par là ?

 

 

 

A suivre...

 

Notes :

 

*Anagramme : mot ou groupe de mots obtenus en mélangeant les lettres d'autres mots.

 

 

 

 

 


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1. gabycmb  le 18-01-2014 à 11:32:26

Bonjour Prof
Il fallait être futé pour trouver!
Bonne fin de semaine.

2. prof83  le 18-01-2014 à 13:17:23

A Gaby.
Bonjour.
Merci pour le com.
Ici il pleut fort avec une alerte orange.
Bon week-end.

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posté le 12-01-2014 à 09:01:28

Grasse (70).

 

Le vélo de course de Mr. Gédebras, le manchot. 

 

La rencontre avec Monsieur Ladérovitch, dans le local aux deux roues, m’avait fortement déçu. Mon malheureux voisin, à la vue de la photo de Lola, s’était contenté de me dire « téléphone ». Une réponse bien sûr inappropriée, pas étonnante de la part d’une personne atteinte de la maladie d’Alzheimer. Il ne me restait plus qu’à repartir de zéro. Pourtant, par acquis de conscience, je me décidai à aller faire une dernière visite au fameux local pour m’assurer que je n’étais pas passé à côté de preuves utiles à mon enquête. Le vélo de course de Monsieur Gédebras était toujours là, probablement laissé à l’abandon par son propriétaire, manchot depuis pas mal d’années. Je soupçonnais mon voisin mutilé de faire partie du gang des parfumeurs grassois qui avait organisé l’enlèvement de Lola, ma pute chérie. Le vélo de course était banal. Les freins n’étaient certainement pas fonctionnels à la vue de leurs manettes trop molles et les boyaux des roues étaient crevés.

- Un objet du passé, murmurais-je en me dirigeant vers la sortie.

Cependant  un faisceau lumineux tombant sans se presser du néon maladif vint illuminer quelque chose située sous la selle de la bicyclette. En me penchant, malgré un lumbago qui m’agressait le bas du dos, j’aperçus sous la tige qui soutenait la selle, une plaque fixée par un collier métallique rouillé.  Pour une fois, mon portable me servit à quelque chose, juste à photographier la plaque avec une résolution de dix mégas pixels.


Voici la photo obtenue :

 

 

 Qui pourrait m’aider à comprendre ?

Apparemment, la partie verte représente la carte d’un pays, mais lequel ? Et les trois lettres « U.C.B », un sigle  qui pourrait signifier :

* Union des Corsaires Borgnes ou

* Union des Cocus Bruxellois ou

* Union des Corses de Bretagne ou

* Unis Contre Bayrou … etc.

Pendant toute la nuit qui suivit, je trouvais ainsi, pas le sommeil, mais des centaines de solutions possibles avec les trois lettres U,C,B.

Au petit matin, j’étais devenu un champion des « Chiffres et des Lettres ». Mon cerveau bouillonnait comme un potage de grand-mère oublié sur la cuisinière à bois d’une ferme provençale. Ma tête était aussi molle qu’un Reblochon* qui se pavanait au soleil et je me demandais comment j’allais pouvoir affronter :

-  les 1eres S, proches de la révolte à cause des contrôles surprises et donc inopinés,

- Jeanne, la prof d’anglais, demi-vierge par vocation, qui me faisait la « gueule » parce que je n’allais pas à ses rendez-vous,

- Françoise Jétoulu, la documentaliste, morte de rage depuis la mort du néon dans la salle de reprographie du CDI et qui me traitait d’impuissant chaque fois qu’elle me rencontrait dans les longs couloirs du lycée…

Bref, seule Lola aurait pu me remonter le moral et Lola avait disparu !

A douze heures quarante-cinq, enfermé à double tour dans mon labo de chimie, j’eus, en regardant le portrait de Lavoisier punaisé sur le mur défraîchi au-dessus de l’évier, comme une révélation : je venais de trouver la raison pour laquelle Monsieur Ladérovitch avait prononcé le mot « téléphone » en regardant la photo de Lola. Et vous ?...



A suivre 


Notes :


 * Reblochon: fromage de lait de vache fabriqué en Savoie (France), à pâte molle non cuite et à croûte de couleur rosée.

 

 

** Lavoisier: Antoine Laurent de Lavoisier, né le 26 août 1743 à Paris et guillotiné le 8 mai 1794 à Paris, est un chimiste, philosophe et économiste français. Il a énoncé la première version de la loi de conservation de la matière, démis la théorie phlogistique, baptisé l'oxygène et participé à la réforme de la nomenclature chimique. Il est souvent fait référence à Antoine Laurent de Lavoisier en tant que père de la chimie moderne.

 

 

 

 

 

 


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posté le 07-01-2014 à 07:04:28

Grasse (69).

 

 Monsieur Ladérovitch...

 

Dans le local aux deux-roues, assis sur le sol, le crâne appuyé sur une roue du vélo de course de Monsieur Gédebras, le manchot, Monsieur Ladérovitch, assommé  par des neuroleptiques, dormait en émettant un ronflement de moteur de moto bientôt en panne d’essence. Je regardais cet homme dépourvu de mémoire et je me demandais si cela valait vraiment la peine de lui montrer la photo de Lola afin d’obtenir des micros informations sur son enlèvement par le gang des parfumeurs grassois.

Il fallait que je fisse vite, car de l’autre côté de la porte j’entendais les va-et-vient des différents habitants de l’immeuble. Je posais, avec infiniment de précautions, ma main sur l’épaule du dormeur privé de rêves et de souvenirs. Je la secouais légèrement et je sentis sous mes doigts les os de son omoplate tant Monsieur Ladérovitch était maigre. Ces malades-là ne mangent pas ou presque pas, toujours occupés à fuir pour rejoindre un lieu qui n’existe pas, un lieu virtuel en somme. Et enfin mon voisin, définitivement amnésique, se réveilla. Il posa sur moi un regard flottant, trouble, baveux, un de ces regards qui ne veulent rien dire et qui ne recherche rien. Sur son visage se grava progressivement le masque de la peur ; pour lui, je devenais une épouvante, un zombie, un horla*, un diable grimaçant avec des cornes titanesques. C’était une frayeur provoquée par la vision d’un être que l’on ne connaît pas, une incongruité de l’existence.

La peur est contagieuse et il me vint comme des envies de fuir ce lieu pas très fréquentable. Seul, le désir que j’avais de retrouver Lola, me riva sur le sol en ciment du local aux deux roues où se côtoyaient deux bicyclettes, un vélomoteur suintant d’huile et d’essence et un landau défraichi, bleu ciel, qui n’avait vraiment pas sa place ici. Quelques bidons métalliques, faméliques et rouillés, vaguement parallélépipédiques, cachaient, dans leur ventre ridé, des liquides inquiétants. Il planait dans ce lieu humide et peu clair une odeur, résultat d’un mélange d’effluves peu académiques. C’était gris, c’était sale, fortement métallisé et cette pièce, qui ne contenait que des objets inanimés, rassurait Monsieur Ladérovitch, qui trouvait là une paix imprévue de l’esprit. Je compris qu’il ne fallait pas lui parler, que je devais rester muet comme toutes ces choses qui l’entouraient.

Avec un mouvement lent comme l’aiguille horaire d’une horloge, je tendis à mon malheureux voisin, la photo de Lola. Son regard effleura comme une caresse la surface du papier et une ride, une seule, disparut de son visage. Son rictus épouvanté s’était atténué d’un infime degré et il murmura un mot, unique et mesuré :

- Téléphone !

Les personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer ne reconnaissent plus les objets, confondent leurs formes et leurs fonctions et un peu dépité, je décidais d’abandonner mon projet fou. Je ne comprenais pas pourquoi Monsieur Ladérovitch avait fait une confusion entre la photo et un téléphone. Devais-je ramener chez lui cet homme sans passé ? Non, je décidais de le laisser ici, presque heureux dans un monde dépourvu de sa femme et de ses neuroleptiques…

 

A suivre

 

Notes :

 

* « Le Horla », de Guy de Maupassant, se présente comme le journal d’un homme, persécuté par une présence invisible, supérieure, maléfique, qui s’apparente à un alter ego ou un double, et le fait sombrer dans la folie, au terme de laquelle l’homme persécuté trouve la délivrance dans le suicide.

 

 


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1. gabycmb  le 12-01-2014 à 09:21:45

Bonjour Prof
Passionnant! pauvre monsieur Ladérovitch.
Bonne journée

2. gabycmb  le 12-01-2014 à 09:25:23

Pourquoi? J'ai beau relire le chapitre et le précédant, je ne vois pas !
Bonne semaine.

3. prof83  le 12-01-2014 à 18:29:50  (site)

A Gaby.
Bonsoir.
Merci pour les coms.
Bientôt la suite !
Bonne soirée et bonne semaine.

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posté le 02-01-2014 à 08:59:52

Grasse (68).

****

La mort de Léon le néon avait plongé la petite salle de reprographie dans une obscurité bienvenue. Dans ces conditions ma bouche ne pouvait plus aller explorer, en aveugle, des endroits peut-être pas trop sûrs…

- Ne bouge pas, me dit Françoise Jétoulu, j’en ai un de rechange, il est dans l’armoire derrière toi. Quand tu l’auras remplacé, tu pourras commencer tes explorations labiales.

Les mains de la documentaliste étaient expertes, j’en savais quelque chose, en deux minutes elle trouva le néon neuf qu’elle me fourra dans la main en me disant :

- Grimpe sur l’escabeau !

Pour moi, brancher un néon dans un endroit autant obscur était aussi dangereux que de se promener à deux heures du matin dans les rues de Bangui(1).

- Alors ça y est ? s’impatienta Françoise.

Moi j’avais soudain l’impression de mettre mes mains dans un réacteur radioactif de l’ex centrale de Fukushima(2).

- Je n’y arrive pas ! dis-je, avec la mauvaise volonté d’un élève paresseux multi-redoublant.

La documentaliste s’énerva en me traitant de « nase », de « nul » et d’ « impuissant » (sa chanterelle ne m’avait pourtant pas encore «essayé »). Sa voix avait l’intonation des cris d’une hyène en chaleur.

J’en avais assez de son attitude peu féminine, revendicatrice et castratrice et je lui dis alors :

- Tu me casses les noix !

Moi aussi, je pouvais être (à contre cœur) vulgaire.

Et je quittais le CDI avec, dans ma poche, la photo du visage de Lola que je comptais montrer, dans les plus brefs délais, à Monsieur Ladérovitch qui naviguait sur une mer de souvenirs incohérents, la mer Alzheimer.

Mais comment contacter mon voisin d’immeuble à la mémoire si volatile ?  Aller tout simplement chez lui ou attendre une rencontre très improbable dans le hall de mon immeuble ?

Dans son appartement, il y avait un cerbère,  sa femme, qui le bourrait de neuroleptiques pour essayer de calmer son envie pathologique de fuite, car Monsieur Ladérovitch, dans sa folie, ne reconnaissait pas les lieux où il avait vécu et un réflexe mémoriel l’amenait à croire que sa maison se trouvait toujours ailleurs.

La nuit qui suivit fut semblable à toutes les autres, grise comme le ciel du Nord et agitée comme une personne victime de la danse de Saint-Guy(3).

Le lendemain matin, à 7h30, j’évitais de justesse toute la bande de parasites qui hantait l’immeuble : le couple Coqualo, Monsieur Gédebras le manchot et Mademoiselle Belœil qui revenait de la promenade-pipi de son chien, un petit Cocker qui me prenait pour une femelle. J’avoue que pour échapper à cette situation, je m’étais réfugié dans le local à vélos où je tombais sur Monsieur Ladérovitch qui dormait, la bouche ouverte et la tête appuyée sur la roue avant du vélo de course de Monsieur Gédebras.    

Pour une fois, j’avais eu de la chance…

 

A suivre

 

Notes :

 

1- Bangui : la capitale et la plus grande ville de la République centrafricaine, dont la population estimée à environ 1 200 000 habitants soit le quart de celle du pays.

2- Fukushima : accident nucléaire provoqué par le séisme du 11 mars 2011.

3- Danse de Saint-Guy : Maladie nerveuse se manifestant par des mouvements brusques et désarticulés et appelée aussi chorée.

 


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1. gabycmb  le 02-01-2014 à 13:34:37

Bonjour Prof.
Je n'ai qu'un mot à dire dommage!!
Bonne reprise

2. prof83  le 02-01-2014 à 14:27:29

A Gaby.
Bonjour.
Merci pour le com.
La reprise sera pluvieuse.
Bonne soirée.

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posté le 27-12-2013 à 07:20:58

Grasse (67).

 

Le Phallus Impudicus,

le champignon qui sent mauvais...

*** 

Je lui montrais donc ce qu’elle désirait voir.

Elle s’accroupit à mes pieds pour mieux regarder, sans rien dire. Moi j’attendais son verdict comme un repris de justice devant la cour d’assises. Je sentis même son souffle chaud balayer la pointe de ma flèche qui transpira un peu.

- Il est comestible ?

- Quoi donc ?

- Mais ton champignon, idiot !

- Disons que c’est plutôt une Amanite phalloïde, mortelle comme il se doit.

Elle me répondit dans un langage peu châtié :

- Pourquoi, tu as l’habitude de fréquenter les putes sans capote ?

Je voulais lui dire que la seule pute que je connusse était Lola qui s’est toujours refusée à moi, allez savoir pourquoi.

Je voyais bien qu’elle avait envie de connaître le goût de mon amanite, avec son chapeau qui pointait vers elle et qui devait exhaler des senteurs automnales.

- Allez, je te dois la vérité, c’est un Phallus impudicus*.

Devant sa mine dégoûtée, je voulu la rassurer :

- Mais non, c’est un Lactaire délicieux !

- Délicieux ? C’est à voir ! Il faut que je vérifie !

Et la voilà partie pour une séance de dégustation gastronomique dans la petite salle sans fenêtre qui donnait sur le CDI et éclairée par un néon malade et hoquetant.

Le lieu était désert et sinistre, je n’avais qu’une crainte, c’est que le concierge ne vînt faire sa tournée d’inspection.

C’était la saison des pluies, ça explique pourquoi, au bout de huit minutes, je lui envoyais dans la bouche une ondée tiédasse qu’elle avala sans sourcilier.

J’étais condamné à des fellations rapides et dénuées de romantisme dans des lieux improbables comme le local à poubelles de mon immeuble ou la salle de reprographie dans un vieux lycée de la Côte d’Azur.

Elle se releva en passant sa langue sur ses lèvres souillées.

- Et toi tu veux voir ma chanterelle** ?

Nous étions en pleine séance de mycologie lycéenne et grassoise.

Pour ne point la vexer, je ne refusais pas. Elle souleva sa jupe et ôta son string noir, qu’elle lança, avec son pied droit, sur le rétroprojecteur qui en hoqueta d’émotion. Puis, en s’aidant de ses mains, elle effectua un petit saut pour s’asseoir sur la table qui supportait la photocopieuse. Elle écarta les cuisses et me montra sa chanterelle. C’était celle, apparemment, d’une femme qui avait vécu, avec des excroissances labiales qui débordaient de chaque côté de sa fissure, luisante, sous la lumière crue du néon.

- Tu la trouves comment ma chanterelle ?

Allais-je lui avouer que je n’aimais pas du tout les champignons, que je les trouvais dangereux et sournois avec une propension à vous envoyer directement au cimetière sans avis de faire-part.

- Tu peux la lécher si tu veux…

Il fallait vite que je trouvasse une excuse valable pour éviter ce contact gluant entre mes lèvres et les siennes.

Françoise Jétoulu, la documentaliste, attendait.

C’est à ce moment-là que le néon fatigué rendit l’âme…  

 

A suivre

 

Notes :

 

   * Phallus impudicus : le satyre puant ou phallus impudique, parfois nommé œuf du Diable à l'état jeune, est une espèce de champignon basidiomycète de la famille des phallacées.

À l'état adulte, il évoque la forme d'un pénis en érection, d'où son nom et, comme la plupart des phallales, dégage une odeur putride.

** Chanterelle :

 

 

 

 

Avouez que ça y ressemble... 

 

 


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1. gabycmb  le 27-12-2013 à 11:06:19

Bonjour Prof
Je confirme! Maintenant cela dépend des goûts de chacun.
Bonnes fêtes de fin d'année. A bientôt pour la suite.

2. prof83  le 27-12-2013 à 15:14:51

A Gaby.
Bonjour.
Merci pour le com.
Bonnes fêtes aussi.
Bonne journée.

3. bluedreamer  le 02-01-2014 à 12:13:32  (site)

Une bonne Année 2014 !

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