posté le 02-04-2014 à 21:17:01

Grasse (86).

 
Elle devait me voir comme ça, Sandrine,
semi-transparent...
 (Sculpture en bronze de Bruno Catalano*)

 
  « Mais, pas de problème Sandrine, c’est avec plaisir que je te raccompagnerai chez toi à 17h ».

Cette phrase je me la répétais en boucle dans ma tête pendant que Sandrine se rapprochait de moi, pour être sûr de ne pas me tromper cette fois-ci.

Son regard me frôla un bref instant et elle changea de direction pour m’éviter, pour ne pas me demander de lui rendre ce service qu’elle avait réclamé déjà à trois de mes collègues.

Elle m’en voulait et je crois bien que c’était définitif !

Pour elle je n’étais qu'un ectoplasme* sans intérêt.

Pourtant je n’abdiquais pas et le Mercredi suivant à 13h05 je frappais à la porte de la salle 21, là où se tenait le club de poésie animé par ma bien-aimée.

Il y avait une quinzaine d’élèves assis autour d’un ensemble formé par la juxtaposition de dix tables.

Je pensais, quand même, que pour écrire des poèmes, la solitude et je dirais même une certaine souffrance de l’âme étaient nécessaires. Ici ce n’était qu’un brouhaha joyeux qui n’incitait certainement pas aux envolées lyriques et romantiques.

En me voyant, Sandrine vint vers moi, avec la mine renfrognée d’une mère supérieure dans un couvent de nonnes.

Elle me lança un regard chargé de cent flèches empoisonnées et me dit :

- Vous vous êtes trompé de salle ! Ici c’est le club poésie !

Que je traduisis immédiatement dans ma tête :

- Dégage connard !

Elle me vouvoyait en plus, pour étaler tout son mépris comme de la marmelade d’oranges amères sur une tranche de pain rassis.

Les élèves s’étaient tus et nous regardaient. Ils s’attendaient à assister à une dispute.

Elle en rajouta une couche (de marmelade) :

- Depuis quand les professeurs de physique s’intéressent-ils à la poésie !

Elle voulait me vexer, me blesser, m’achever.

Mais au moins, pour un bref instant, à ses yeux, j’avais perdu ma tunique défraîchie de fantôme.

J’étais debout à l’entrée de la salle et j’avais l’impression que d’énormes rivets en acier trempé traversaient mes pieds pour me souder au sol.

Sandrine me tourna le dos pour m’induire de toute son indifférence et moi, comme par miracle, je retrouvais l’usage de mes jambes. J’allai m’asseoir près d’une table laissée libre du côté de la grande fenêtre, mal isolée, qui laissait passer les humeurs capiteuses des parfums qui s’échappaient des cheminées des usines de la ville de Grasse.

Sandrine frappa dans ses mains pour obtenir le silence et déclara :

- Vous allez maintenant réciter les poèmes que vous avez appris.

Albin, Thierry et Océane passèrent au tableau à tour de rôle pour déclamer des poésies de Verlaine, Hugo et Rimbaud.

C’est à ce moment-là que je compris que Sandrine me préparait un coup vache…

Sans me regarder, bien en face des élèves, elle dit :

- On va maintenant demander à Monsieur N………, le professeur de physique de nous réciter un poème, s’il en connait au moins un, bien sûr !

Je me sentis devenir aussi rouge qu'un Apache timide.

J’étais à deux doigts de perdre la face devant tous les élèves. Il fallait que je trouvasse quelque chose à dire.

- Heu, j’ai bien appris dans ma jeunesse, des poèmes, mais j’ai oublié hélas beaucoup de vers !

Les élèves se mirent à rire.

Sandrine gloussa, satisfaite de sa vengeance.

Je devais reprendre la main, juste pour oublier les fesses si rondes de la prof de français.

- Oublions Hugo, Verlaine, Rimbaud et tous les autres, je vais vous réciter un poème bien meilleur que ceux des poètes que je viens de citer.

Sandrine se figea. Les élèves se cabrèrent.

- C’est un poème que j’ai écrit !

Ce fut soudain la grosse rigolade, une cacophonie que l’on entendit depuis la loge du concierge.

Ils étaient tous, prêts à se rouler par terre, morts de rire, devant l’incongruité*** de mon discours…

 

A suivre

 

 

Notes :

 

* Bruno Catalano est un artiste français né en 1960.

Son talent réside dans sa capacité à doter l'insaisissable matériel avec une essence transcendantale. Etant un rêveur romantique, son sujet-cause sculpté prend forme dans le cadre fantastique d'un monde idéal où l'amour, la paix, la beauté et l'harmonie règnent.

**Ectoplasme: individu sans substance ou insignifiant (péjoratif), créature immatérielle.

*** Incongruité: acte ou parole inattendus et choquants.

 

 


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posté le 26-03-2014 à 09:06:43

Grasse (85).

- 

Bon j’imaginais avoir compris pourquoi Sandrine m’ignorait complètement, c’était certainement à cause de mon refus  d’aller chez elle, un Samedi, pour l’aider à décoller la vieille tapisserie de son appartement. Je m’en voulais beaucoup, car ma bouche avait dit des phrases absolument contraires à ce que je pensais. Allez savoir pourquoi.

Il est absolument atroce qu’une personne que l’on aime beaucoup nous trouve vraiment antipathique. On se sent aussi mal qu’un arbitre qui entend dans le stade :

- A mort l’arbitre !

Ou bien quand on a un accident le premier jour où l’on circule avec sa voiture neuve.

C’est la tuile !

Je me contentais à cause de tout cela de la regarder, elle, de l’aimer en silence sans espoir de réciprocité. Ce n’était pas complètement négatif car son attitude alimentait mon inspiration poétique qui me permettait de « pondre » régulièrement un poème bio, du genre des œufs de Loué certifiés 100 pour cent bio ou label rouge.

A défaut de caresses, Sandrine devenait ma muse et malaxait mes neurones !

Je lui envoyais des mails anonymes et romantiques auxquels elle répondait en se moquant de moi, sans savoir qui j’étais et qui me vexaient profondément.

Sandrine était jolie et sexy, mais il lui manquait quelques brins de féminité qui font que la femme devient absolument craquante…

Un matin vers huit heures, alors que la ville de Grasse baignait dans une brume parfumée, Sandrine s’affairait devant le panneau en liège destiné à l’affichage des profs. Je la voyais de dos, ce qui était une bonne affaire pour moi. Elle était tout simplement en train de punaiser, sur la surface ligneuse et tendre, une feuille qui devait être une invitation à une randonnée de cinquante kilomètres dans l’arrière-pays niçois. Une pure folie quoi !

Quand elle quitta la salle des profs pour aller prendre ses élèves, moi, curieux comme une anguille-concierge, je me précipitais vers le panneau pour lire ce qu’elle avait écrit :

 

 

 

 

Pffff, de toute évidence, ce « presque » signifiait que je n’étais pas le bienvenu dans son club de m…e !

Elle avait la rancune tenace !

A cause d’elle, mon cœur semblait se fissurer comme celui d’une brebis promise au sacrifice.

Le lendemain, pour me venger d’elle, je mis un point d’honneur à ne pas reluquer ses fesses. Cela ne la toucha nullement vu qu’elle ignorait mon voyeurisme pédago-fessier.

Au début de la récré de 15h, nous étions quatre professeurs assis autour de la grande table de la salle des profs quand Sandrine entra. Il y avait Philippe, le prof de maths, Jeanne, la prof d’anglais, Basile le prof d’EPS et moi.

Sandrine avait un problème de voiture et elle demanda à Philippe, à Jeanne et à Basile, s’ils pouvaient la raccompagner chez elle à 17h. Les trois professeurs avaient un conseil de classe ce jour-là et furent désolés de ne pas pouvoir répondre favorablement à sa demande.

Il ne restait plus que moi. J’avais baissé la tête pour ne pas la gêner. Elle me jeta un regard furtif qui chiffonna brièvement mon cœur et elle vint vers moi.

J’avais déjà préparé ma réponse et je murmurais cent fois dans ma tête :

- Mais, pas de problème Sandrine, c’est avec plaisir que je te raccompagnerai chez toi à 17h.

Cette fois-ci, il ne fallait surtout pas que je me trompasse de phrase. C’était une question d’honneur, de survie même !

Et pourtant rien ne se passa comme je l’avais souhaité…

 

A suivre  

 


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1. gabycmb  le 26-03-2014 à 13:15:22


Bonjour Prof.
Ah! l'amour ça rend idiot!
Bonne continuation

2. anaflore  le 26-03-2014 à 15:55:22  (site)

au moins ici il y a du suspens.......bon mercredi

3. prof83.  le 26-03-2014 à 16:26:17

A Gaby.
Bonjour.
Merci pour le com.
C'est vrai ça !...
Bonne soirée.

4. anaflore  le 30-03-2014 à 14:10:42  (site)

???? bon dimanche?????en panne???

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posté le 21-03-2014 à 07:21:35

Grasse (84).

 

*

Une rue dans le vieux Grasse.

* 

Dans ma tête commença à s’agglomérer une vague explication de l’attitude de Sandrine à mon égard.

Pour elle, j’étais un fantôme. Point barre !

L’année dernière elle avait décidé d’acheter un appartement dans le vieux Grasse. C’était sa première acquisition et cela la rendait excitée comme une puce. Le seul problème, c’est qu’il y avait des travaux à faire, surtout au niveau des peintures et des tapisseries murales qui avaient l’âge de leurs moisissures.

Moi je n’aime pas les appartements anciens ! J’ai comme l’impression de cohabiter avec des morts, les anciens occupants successifs qui, au fil du temps, étaient décédés dans ces lieux.

Un matin, à la récré de 10h, Sandrine vint s’asseoir à côté de moi. Mon seul regret, c’était qu’elle ne fût pas parfumée, mais au diable mon nez de chimiste, mon cœur se trouva soudain soumis à une brutale accélération comme celle que subissent les pilotes de formule 1 au démarrage d’une course de grand prix. Mes muscles, tétanisés, avaient la densité de l’ébène, ce bois noir des arbres géants d’Afrique. Je n’osais même pas la regarder dans les yeux et je crois même que je me mis à loucher. Mais que me voulait-elle mon Dieu ? Je regrettais le temps ancien quand mes yeux de voyeur se contentaient de caresser ses fesses, de loin, quand elle avait le dos tourné. Elle paraissait gênée. Son genou droit s’appuyait sur ma cuisse et j’avais l’impression qu’une dague acérée trifouillait dans ma chair. J’étais cloué sur place, sur mon fauteuil, comme un Jésus-Christ pédagogique. Elle était à peine maquillée, plus sportive que féminine, je dirais. Moi, je préférais qu’une femme fût le contraire, mais qu’importe, elle était près de moi, rien qu’à moi, mais pour combien de temps ?

Elle se pencha vers mon visage.

Je devins complètement idiot !

Même mes hormones mâles semblaient perdre de leur superbe, affolées, liquéfiées, désabusées et timides.

Elle murmura une phrase que je ne compris presque pas, comme si elle parlait dans une langue gothique.

- Alain, tu sais que j’ai acheté un appartement dans le vieux Grasse, mais il y a quelques travaux à faire. Ça te dirait de venir Samedi chez moi pour m’aider à décoller la vieille tapisserie ? Je te ferai une pizza !

C’est à ce moment-là que je fus nommé le plus grand taré de la galaxie, le débile profond de l’univers, l’idiot de toutes les constellations de l’hémisphère Nord et de l’hémisphère Sud, le nul parmi les nuls, l’illettré des sentiments,  car je lui répondis :

- Je n’aime pas les pizzas !

Elle me regarda, ébahie et se leva sans rien dire. Quand elle me tourna le dos pour aller s’asseoir à la grande table, je n’eus même pas la force de regarder ses fesses.

Je m’en voulais comme une mère qui abandonne son enfant sur la marche froide et humide d’une porte cochère.

J’étais le roi des imbéciles, car en fait j’adore les pizzas, toutes, aux fromages, aux champignons, aux fruits de mer, au jambon, des quatre saisons… Alors pourquoi ai-je répondu : « je n’aime pas les pizzas ! » ? C’est le mystère du siècle, plus difficile à comprendre que la mécanique quantique, que l’origine de l’homme, que les pensées de la femme…

Et depuis ce jour-là, maintenant je sais pourquoi, je suis devenu, aux yeux de Sandrine, un fantôme invisible qui hante le lycée…

 

A suivre

 


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1. gabycmb  le 21-03-2014 à 10:00:44

Bonjour Prof.
Voilà, maintenant on comprend pourquoi Sandrine est aussi désagréable!
Bonne journée.

2. prof83  le 21-03-2014 à 21:19:33

A Gaby.
Bonsoir.
Merci pour le com.
Bon WE.

3. Traiteur lorrain  le 22-03-2014 à 17:15:23

Sur ce coup là votre héros a été, comment dire, une vraie quiche !

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posté le 16-03-2014 à 08:53:33

Grasse (83).

 

 

 

Chez moi, pendant la nuit qui suivit, mon lit ressembla à une gondole à Venise. Comment voulez-vous dormir dans ces conditions ?

Pour elle je n’étais qu’un fantôme, une sorte d’ectoplasme gélatineux pratiquement invisible.

J’avais donc son adresse mail et je comptais bien m’en servir ! Comment ? Mais tout simplement en lui envoyant des messages anonymes. J’avais aussi une adresse mail, mais avec mon nom, ce qui la rendait inutilisable pour ce que je voulais faire.

J’en créais une nouvelle : tonregard@yahoo.fr et un soir je me lançais à l’eau aussi courageux qui chat hydrophobe. Je rédigeais ce mail :

 

Date: …………………….

From: tonregard@yahoo.fr

Subject: Bonjour

To: sandrine….@hotmail.com

 

Les passantes de Georges Brassens.

 

Je veux dédier ce poème,

A toutes les femmes qu'on aime,

Pendant quelques instants secrets,

A celles qu'on connaît à peine,

Qu'un destin différent entraîne

Et qu'on ne retrouve jamais.

……………………………………………….

……………………………………………….

……………………………………………….

……………………………………………….

         

Alors, aux soirs de lassitude,

Tout en peuplant sa solitude,

Des fantômes du souvenir,

On pleure les lèvres absentes,

De toutes ces belles passantes,

Que l'on n'a pas su retenir.

 

 Rapidement je reçus la réponse suivante :

 

Sandrine…. <sandrine….@hotmail.com> a écrit :

 

pfffffffffffffff, ridicule !

 

 

 

Cela commençait mal !

De toute évidence elle n’appréciait pas Georges Brassens.

Je ne voulais pas qu’elle me reconnût ! J’avais bien envie de tout abandonner, laisser moisir dans ma tête tout l’amour que j’avais pour elle. Un amour tout à fait platonique ! S’en rendait-elle compte au moins ?

Alors pour atténuer ma déception, je pensais à mon véritable amour, à Lola la pute qui devait vivre un enfer dans un bordel de Bamako ou sur les trottoirs de cette ville, la nuit…

J’avais envisagé, il y a quelque temps, un voyage  là-bas, dans ce lointain pays d’Afrique pour aller la chercher ou la délivrer plutôt, mais je manquais d’énergie et de courage. Périodiquement pourtant ma volonté semblait grignoter ma couardise  qui ne se laissait pas faire et qui regagnait sans peine le terrain perdu.

La journée qui suivit, au lycée, m’enfonça un peu plus profondément dans cette mélasse dans laquelle je semblais naviguer et sans rame en plus. Dans la salle des profs, nous étions tous assis dans les fauteuils, huit en tout et autour de la table centrale, rectangulaire et encombrée de feuilles et de revues diverses. Sandrine, grande sportive, organisait pour le week-end une randonnée du côté de la vallée des merveilles et circulait dans la salle avec une feuille dans la main pour noter le nom de ceux qui désiraient y participer. Elle allait comme ça de prof en prof, gentille et souriante et notait le nom des volontaires. Elle s’adressa à tous, sauf à moi. Elle m’ignora complètement comme si j’étais absent.

Pourquoi ?

Me trouvait-elle à ce point antipathique ou avait-elle deviné que le mail anonyme avait été envoyé par moi ? Peut-être avait-elle perçu mes regards qui la caressaient en silence et elle ne voulait pas me laisser espérer la moindre relation avec elle ?

Je ne voulais plus penser à tout ça et pourtant, vers 16h42, en plein contrôle de chimie avec une 1èreS, je me souvins d’un événement  survenu l’année dernière et qui expliquait, peut-être, le comportement de Sandrine…

 

A suivre

 

 

 

 


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1. gabycmb  le 16-03-2014 à 09:34:40

Bonjour Prof
Bon dimanche à vous aussi tous les lecteurs du blog.
Sacrée Sandrine!
Bonne reprise.

2. prof83  le 16-03-2014 à 14:39:19

A Gaby.
Bonjour.
Merci pour le com.
Bon Dimanche.

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posté le 11-03-2014 à 08:47:15

Grasse (82).

 444 

Le lendemain matin, comme un clown désenchanté, après un quart de nuit sans dormir à cause du conseil de classe de la veille, j’ouvris mon casier situé sur un mur de la salle des profs. Il était 7h45 et déjà quelques professeurs aux cerveaux périmés, hantaient ce lieu, véritable sas de décompression avant la plongée brutale vers les grands fonds pédagogiques, les salles de classe et peuplés de créatures monstrueuses, les élèves.

Derrière moi, une grande table d’au moins trois mètres de long, autour de laquelle étaient assis Philippe, le prof de maths atteint d’aboulie* chronique, Jeanne la prof d’anglais aux yeux globuleux qui se prétendait presque vierge, Marilyne la prof de philo à demi-divorcée d’Emile, un mari jaloux, professeur de tir à l’arc, qui avait failli nous surprendre un soir dans une position d’acrobatie sexuelle et Sandrine, la prof de lettres modernes, qui avait hérissé mon épiderme à cause du contact de sa cuisse sur la mienne et qui avait affiché à mon égard un mépris indifférent et moqueur. Tous ces enseignants, atteints de logorrhée** professionnelle, remplissaient la salle de leurs phrases et de leurs rires plus que forcés.

Dans mon casier j’aperçus une enveloppe de couleur rouge qui m’inquiéta quelque peu. Je l’ouvris et je sortis une feuille blanche sur laquelle était dessiné grossièrement un cœur rouge lui aussi. Brusquement le silence se fit dans la salle et j’eus l’impression que quatre paires d’yeux étaient posées sur mon dos. Etais-je victime d’une plaisanterie de mauvais goût de la part de mes collègues qui avaient été contaminés par la facétie méchante de leurs élèves ? Je me retournais brutalement pour les surprendre, mais hélas ils avaient tous repris leur activité de bavardage aigu et semblaient m’ignorer complètement.     

Alors qui avait eu l’idée de cette blague de mauvais goût ?

Jeanne qui semblait amoureuse de moi ?

Philippe ? Non, pas possible aboulique comme il était !

Marilyne qui aimait bien décortiquer, en bonne philosophe, les émotions de chacun ?

Je penchais plutôt du côté de Sandrine qui était assise à côté de moi lors du conseil de classe de la veille et qui m’avait vu, pendant une heure, dessiner des cœurs avec mon stylo rouge. Elle voulait se moquer de moi de toute évidence.

Je me sentais ridicule, humilié presque, aux yeux de mes collègues. J’allai dans le coin de la salle pour m’asseoir dans mon fauteuil préféré et je dressai des barricades virtuelles (en faisant la « gueule ») pour décourager toute tentative de dialogue avec les autres, les traîtres…

A la récré de 10h, Sandrine m’ignora complètement comme d’habitude et moi je reluquais ses fesses, moulées dans son jeans, quand elle se pencha un peu pour extraire de la machine à café son gobelet de thé fumant parfumé au plastique.

Elle alla s’asseoir pas loin de moi, près de sa copine, la prof d’allemand, pour la convaincre de participer à une marche de dix kilomètres le Dimanche suivant. Quelle horreur ! Je tendais l’oreille pour capter des informations de filles… Finalement elles échangèrent leur adresse mail pour confirmer ou infirmer la sortie. J’avais bien fait de les espionner un peu car je pus graver dans mon cerveau son adresse mail : sandrine….@hotmail.com.

Avec cette information capitale, j’avais de quoi faire…

 

A suivre

 

Notes :

 

* Aboulie : absence maladive de volonté, incapacité d'agir.

** Logorrhée : flux de paroles. Besoin maladif de parler qu'éprouvent certains sujets en état d'excitation psychique.

 


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1. gabycmb  le 13-03-2014 à 08:20:35

Bonjour Prof
Le suspense continue, je ne m'en plains pas!
Bonne journée.

2. prof83  le 13-03-2014 à 13:34:07

A Gaby.
Bonjour.
Merci pour le com.
Ici ciel bleu et soleil.
Bonne journée.

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