posté le 02-07-2014 à 08:42:08

Grasse (105).

 Ce que je deviens lorsqu'elle me frôle.. 

5 

Elle habitait dans un appartement, au dernier étage, sans ascenseur, d’un immeuble ancien situé dans le vieux Grasse. J’avais juste eu le temps de passer dans une pâtisserie pour acheter quelques gâteaux qui franchement n’avaient pas une mine très catholique. Hypochondriaque, je craignais une intoxication alimentaire à cause de cette chaleur de fin Juin qui devait certainement activer le développement de bactéries plus que pathogènes. C’est pour cette raison que j’avais pris des tartes aux fruits, dépourvues de crème.

Le quatrième étage, ça faisait bien haut. Les marches de l’escalier étaient plutôt gondolées, déformées comme le visage d'un boxeur laborieux proche de la retraite. Enfin j’arrivais sur le palier où trois portes de couleur marron avaient l’air de m’attendre. Laquelle choisir ? Aucun nom sur le bois défraîchi, rien. J’étais assez essoufflé. L’émotion ? Mon cœur était-il atteint de délires de tachycardie aigüe ? Ça ressemblait à un test de l’effort passé chez un cardiologue chez qui je n’irai jamais. De la porte de gauche suintait des effluves de soupe aux choux. Ce n’était donc pas celle de Sandrine qui m’avait promis une simple pizza. De l’appartement du milieu parvenaient des miaulements agaçants d’une chatte en chaleur. J’étais presque sûr que Sandrine n’en possédait pas (je pense à l’animal bien sûr). Il ne restait plus que la porte de droite aussi anonyme qu’un facteur à bicyclette. C’est là que j’appliquais trois petits coups discrets avec les phalanges de ma main droite fermée. Rien ! J’eus soudain la tentation de m’enfuir, de dévaler les marches comme un voleur inquiet.

La porte s’ouvrit enfin. Je me retrouvais en face de Sandrine, loin du lycée, dans un lieu inhabituel, émouvant presque, l’entrée de son appartement. Je devais être ridicule avec ma boîte de gâteaux et mon petit sac en plastique qui contenait un flacon d’acide chlorhydrique. Elle m’embrassa sur les deux joues. Je fus déçu. Mes jambes avaient la consistance de caramel mou. Je la suivis en essayant de ne pas reluquer ses fesses. Nous traversâmes un petit hall où seuls un miroir et une crédence en bois cérusé se faisaient face, muets comme un vieux couple presque sourd. On entra dans le salon, assez petit, pas plus de quinze mètres carrés à mon avis. Il y avait là un canapé en cuir noir et un fauteuil assorti et dans le coin une chaîne Hi-Fi avec des baffles mal disposées qui auraient mérité un meilleur emplacement pour donner toute sa profondeur à un son stéréo. Elle s’arrangea pour me faire asseoir sur le canapé et elle s’installa dans le fauteuil. Mauvais signe : elle mettait déjà une certaine distance entre nous.

Mes genoux touchaient presque une petite table basse en verre fumé parallèle au canapé. J’y déposais mon petit sac en plastique, gauche comme un carabinier arthritique. Elle me dit :

- Je vais mettre les gâteaux au frigo !

Et elle disparut pendant cinq minutes.

Vraiment  mal partie cette affaire !

J’eus le temps de réfléchir à la condition humaine en général et à la famine en Afrique, juste pour me dégourdir les neurones.

Quand elle revint, mes narines perçurent un petit cyclone de parfum qui tournait autour d’elle ; c’était Shalimar de Guerlain que j’avais appris à bien connaître. Je commençais à être inquiet quand même ; j’aurais préféré une odeur de pizza riche en origan.

Sandrine savait ce qui allait se passer entre nous, moi pas. J’allais découvrir au fur et à mesure les règles qu’elle avait fixées. Quel est l’imbécile qui a dit que les femmes étaient inférieures aux hommes ?

Elle se tint debout devant moi un long moment, que mon émoi m’empêcha de mesurer. Je me sentis devenir une nanoparticule piégée dans un cyclotron gigantesque.

C’est alors qu’elle déclencha la mise à feu, qu’elle appuya sur le bouton rouge qui allait provoquer une guerre thermo-nucléaire : elle s’assit près de moi !

La bombe d'Hiroshima, un gadget !...

 

A suivre

 

 


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posté le 27-06-2014 à 07:31:43

Grasse (104).

 Dans mon cerveau, quand elle me parle...

 

 

Mon envie de Sandrine m’avait un peu fait oublier Lola.

Lola qui était un repère dans la rue voisine de celle de mon immeuble. Elle trônait comme un réverbère, souvent adossée à lui, sur le trottoir en attendant le client. Paulo était son mac, en prison pour quinze ans dans la maison d’arrêt de Grasse. La coursive de mon appartement situé au dernier étage dominait la cour où les détenus prenaient l’air de temps en temps. Pour faire plaisir à Lola, je fournissais à Paulo, en les lançant par-dessus la rambarde rouillée, des paquets de cigarettes et parfois des cartouches entières, qu’il saisissait en vol en me faisant un petit signe de remerciement.

Lola était disponible pour tous les mâles en rut de Grasse et des environs. Pour tous, sauf pour moi ! Plusieurs fois elle avait refusé de m’accorder sa bouche et tout le reste. Allez savoir pourquoi. Et puis un jour, elle disparut, ma jolie pute d’amour. Je soupçonnais Monsieur Gédebras, le manchot, au passé trouble comme du pastis, de l’avoir fait enlever par ses acolytes du gang des parfumeurs grassois dont il était un membre actif. J’avais mené ma petite enquête et je pensais que Lola avait été envoyée à Bamako (Mali) pour tapiner dans un bordel local. La pauvre !

A cause de la perte de ma putain de muse, j’avais reporté toute mon « affection » sur Sandrine, ma collègue, prof de lettres modernes, qui avait, avec moi, un comportement plus mystérieux que la mécanique quantique. Je l’ignorais, elle m’ignorait et pourtant j’aimais bien reluquer ses fesses moulées dans un jeans certainement fabriqué par Belzébuth lui-même. Je ne savais pas comment faire pour la draguer. Devant elle, je perdais tous mes moyens comme un vieux chasseur mâle devant une gazelle.

La fin de l’année scolaire approchait comme un train qui entre en gare. Il ne fallait pas que je le ratasse celui-là. Un soir vers 17h, Sandrine traînait dans la salle des profs. Il faisait chaud, pas loin de 30°C et le soleil pénétrait sans se gêner par la façade Ouest vitrée dont les stores vénitiens avaient rendu l’âme. Je la voyais farfouiller dans son sac à la recherche de monnaie qu’elle ne trouva pas. Alors elle vint vers moi. Immédiatement je revêtis mon armure en acier triple épaisseur, par instinct, sans réfléchir.

- Tu pourrais me prêter deux euros ? me dit-elle, gênée comme une méduse dépressive.

J’étais prêt à tout pour elle.

Mais comme un autiste primaire, je ne répondis pas.

- Et surtout, j’espère que tu ne vas me demander de balayer la salle des profs !

Et elle se mit à rire. Mon armure s’enrichit de deux couches d’acier supplémentaires.

Je lui tendis les deux pièces et c’est là que j’eus l’impression de sombrer dans un coma irréversible. Sa bouche s’était posée sur la mienne pour un baiser peu pédagogique.

Je ne savais plus où l’on se trouvait, ni à quelle époque on vivait, peut-être au Moyen-Age ?

Alors je lui dis :

- Tu as résolu ton problème de calcaire ?

Peu poétique cette phrase !

- Non, mais si tu veux bien m’aider, je t’invite à manger une pizza ce soir chez moi.

Dans ma tête, un combat de gladiateurs, sur une piste sableuse, massacrait mes neurones.

Je dis timidement :

- Oui, bien sûr !

Ouf, j’avais choisis la bonne réplique…

 

A suivre

   

 


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posté le 22-06-2014 à 07:48:49

Grasse (103).

 On peut toujours rêver...

 

Ces fins d’années scolaires s’étiraient comme du caramel mou abandonné au soleil. Tout devenait collant et on avait l’impression que jamais on n'allait arriver à se dépêtrer de ce lieu qui nous retenait encore. On surveillait les épreuves du Bac et il faisait chaud. De temps en temps, pour éviter l’engourdissement de nos neurones, on abandonnait quelques minutes le collègue réquisitionné avec nous pour filer vers la salle des profs et avaler une boisson fraîche ou se soulager dans les toilettes.  

A midi, quelques élèves inquiets, malgré la fin de l’épreuve, traînaient dans les salles. Il fallait les forcer à rendre leur copie. J’avais faim et je filais vers mon labo où j’avais mis dans le frigo un sandwich tomates-thon dégoulinant d’huile d’olive. Mon maigre repas côtoyait sur la clayette froide des béchers contenant des cuisses de grenouilles et des cœurs de poulets placés là par ma collègue de SVT dont le congélateur avait rendu l’âme. L’odeur était forte. Je mangeais avec inquiétude mon thon qui contenait certainement de fortes doses de métaux lourds (principalement du mercure) et qui provenait de mers ou d’océans malsains.

On frappa à la porte. Je ressentis un néant envahir mon cerveau qui se vidait brutalement comme une chasse d’eau que l’on tire avec nervosité. Que me voulait-on encore ? Je jetais rapidement un œil sur la vitre d’une armoire qui faisait office de miroir de fortune. L’image qu’il me renvoya alors mit mon moral à rude épreuve. J’avais les joues bien rouges et les lèvres luisantes d’huile d’olive. Un vrai clown de pacotille !

Je me dis :

- Pourvu que ce ne soit pas Sandrine !

Et malheureusement c’était Sandrine !

Que me voulait-elle encore celle-là ?

- Tu m’offres un café ? me dit-elle, avec un sourire indécodable.

- Ma cafetière est tout entartrée, elle ne fonctionne plus.

- Mais le tartre, c’est du calcaire non ?

- Oui…

Elle s’approchait de moi dangereusement.

- Et je sais maintenant que l’acide chlorhydrique détruit le calcaire !

Elle avait retenu la leçon et elle louchait sur un flacon placé sur la table et dont l’étiquette portait la formule simplifiée de l’acide chlorhydrique : HCl.

J’essayai de la décourager.

- Cet acide est un poison alimentaire. Après utilisation il est nécessaire d’effectuer de nombreux rinçages à l’eau.

Elle était très proche de moi et je sentais son parfum Shalimar aux effluves orientaux. Moi, je devais dégager une odeur de thon à l’huile d’olive.

Elle murmura :

- En fait, je voulais m’excuser pour l’autre fois. J’ai réagi un peu vivement, comme une féministe bornée. J’ai plusieurs choses à te dire…

- Oui ?

- Tu sais Basile, le prof d’EPS…

- Oui, ton amoureux…

Elle se mit à rire :

- Mais il est homo voyons ! Je dois te transmettre un message, mais j’espère que tu ne vas pas te fâcher…

- Oui ?

- Il a flashé sur toi !

- ???

- Il a l’intention de te draguer !

- Je n’ai rien contre les gays, mais je n’en suis pas un ! Tu lui diras hein ?

- Bon, j’ai vraiment besoin de détartrer mon WC. Alors tu me le donnes cet acide chlorhydrique ? Tu pourras me demander tout ce que tu veux en échange…

Je répondis un peu trop vite :

- C’est d’accord. Alors balaye cette salle !

Plusieurs heures plus tard, je n’avais pas encore compris pourquoi elle s’était enfuie du labo sans rien dire…

 

A suivre

 


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posté le 17-06-2014 à 08:26:10

Grasse (102).

L'ancêtre du chimiste: l'alchimiste.

 

  Quelqu’un frappa à la porte de mon labo.

Je n’avais envie de voir personne, trop occupé à mettre un peu d’ordre dans le fouillis indescriptible qui régnait dans cette pièce. Un collègue bavard en mal de confidences voulait certainement tuer le temps qui passe en papotant avec moi. Je n’avais pas la tête à ça !

La personne insista.

Je me sentis obligé d’aller ouvrir la porte blindée en tournant la grosse clé de sécurité dans la serrure qui avait bien besoin d’un graissage intime. J’affublais mon visage d’un masque antipathique, peu souriant et virtuel pour décourager le gêneur.

En apercevant mon visiteur, j’eus comme un frisson de l’âme, un froissement de ma volonté qui avait tendance à se replier sur elle-même.

J’avais l’impression d’avoir la berlue. Mes rétines me jouaient des tours certainement. Mais mon odorat qui détecta ces effluves de parfum « Shalimar », valida ma perception.

C’était Sandrine, c’était bien elle !

Que venait-elle faire dans mon labo ?

J’eus juste le temps de revêtir mon armure en acier chromé triple épaisseur anti-amour.

- Oui ? dis-je avec un visage purement inamical.

- Je peux entrer ? dit-elle en me poussant vers l’intérieur.

Elle avait le sourire-coup-de-massue, ravageur comme un nuage de sauterelles affamées qui détruisent les cultures en Afrique.

J’avais envie de crier « grâce » avant de recevoir le premier coup mortel.

Elle avait troqué  son jeans délavé et moulant contre une jupe assez courte, au-dessus des genoux, qui révélait une chair ferme que finalement je n’avais jamais vue.

Avais-je besoin de ça pour être  projeté dans les limbes, comme chaque fois que je la côtoyais à moins de 1m50 de distance ?

Après le papier peint à décoller dans son nouvel appartement et la virée au festival de Cannes, qu’allait-elle encore me demander ?

Elle fit semblant de s’intéresser au matériel de chimie et de physique qui encombrait les paillasses en me posant quelques questions débiles (c’était une prof de lettres modernes après-tout) auxquelles je répondais sans conviction en attendant de connaître le vrai motif de sa visite.

- J’ai un petit problème avec mon WC, me dit-elle soudainement.

Ce n’était pas très romantique tout cela.

- Voilà, la cuvette est recouverte de calcaire que je n’arrive pas à enlever…

Je lui coupais la parole :

- L’acide chlorhydrique* est un remède miracle pour cela !

 - Oui, je sais, me répondit-elle, je l’ai lu sur internet. Pourrais-tu m’en donner un petit peu ?

Voilà, pour elle je ne représentais que le collègue qui rend service et c’est tout.

Je n’allais pas encore succomber au charme empoisonné qu’elle m’envoyait encore une fois pour parvenir à ses fins.

J’eus soudain l’intention de devenir odieux avec elle :

- Oui, je te donnerai un flacon d’acide chlorhydrique si tu fais la vaisselle de toute la verrerie de cette paillasse !

Il y avait trente béchers** sales et une cinquantaine de tubes à essais** qui avaient contenu divers produits chimiques et un goupillon** pour les laver.

   Elle plissa les yeux avec des sourcils en accents circonflexes.

Elle cria presque :

- Mais tu es un sale macho ! Je ne suis pas ta bonniche !

Et elle sortit du labo en claquant la porte. (qui en réalité ne claqua pas car elle était freinée par un ralentisseur***).

 En cette fin d’année scolaire, avais-je perdu définitivement Sandrine ?

 

A suivre

 

Notes :

 

 *Jabir ibn Hayyan : découvreur de l’acide chlorhydrique.

  Jabir ibn Hayyan (également connu sous le nom latin de Geber, 721–815 apr. J.-C. fut un polymathe, philosophe et alchimiste musulman.

 Plus de 3 000 traités ou livres lui sont attribués d'une façon ou d'une autre. Les domaines abordés incluent la cosmologie, la musique, la médecine, la magie, la biologie (notamment la fabrication artificielle d'êtres vivants), la technologie chimique, la géométrie, la métaphysique et la logique

 

 

 

 **

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

  

 

 

 

 ***                                        

 

 

 

 


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1. anaflore  le 18-06-2014 à 18:20:08  (site)

bien jouésmiley_id118869!!où je peux trouver ce remède miracle?,smiley_id117076

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posté le 12-06-2014 à 08:35:25

Grasse (101).

 

 

L’oublier, oui, c’était tout ce qu’il me restait à faire !

Oublier Sandrine.

Ne plus penser à elle, éviter de la rencontrer au lycée, la fuir comme la peste du Moyen-Age.

Il y avait bien un lieu ultra-dangereux pour moi : la salle des profs où nous nous retrouvions aux récrés pour souffler un peu, nous reposer et boire un café en parlant de nos soucis.

Après mon escapade ratée au festival de Cannes, de retour chez moi, et cela de 17h à 2h du matin (heure à laquelle je parvins à m’endormir un peu), je ne pouvais m’empêcher de me faire du mal : penser à Sandrine et à Basile, à ce qu’ils avaient certainement fait à Cannes, une ville de perdition, dans des endroits peu confortables à l’abri des regards indiscrets, car le sexe à ses raisons que la raison ne connaît point (tiens ça me rappelle quelque chose ça*).

Ce n’était pas tant la jalousie qui laminait mes neurones, mais plutôt mon orgueil blessé qui maintenait la porte ouverte, la porte de l’oubli, la porte qui grince en plein milieu de la nuit.

Tout le long du trajet entre Grasse et Cannes, Sandrine s’était montrée distante, froide comme une momie enfermée dans un congélateur. Je me disais alors que c’était son caractère réservé qui la faisait agir ainsi.

Parfois, je suis plus idiot que je ne l’imagine !

Il y a la métamorphose de la chenille en papillon bien connue des élèves qui écoutent et qui apprennent leurs leçons, mais moi j’ai assisté à un autre genre de métamorphose, celle de Sandrine lorsqu’elle a rencontré Basile, le prof d’EPS, à la sortie du cinéma. Elle devint subitement chaleureuse et même souriante et excitée comme si elle avait avalé un morceau de Vésuve incandescent. Bref, pour être vulgaire, elle s’était transformée en une chienne en chaleur.

Au lycée, c’était la période d’avant-bac, celle où les élèves sont absents et où l’on pouvait souffler un peu et préparer déjà l’année scolaire suivante. On errait pas mal dans les longs couloirs de l’établissement et on squattait à longueur de temps la salle des profs, avachis sur les fauteuils de couleur bleu-pétrole, à la propreté incertaine. C’était un lieu idéal de rencontres. Moi, assis tout au fond, j’évitais de poser mes yeux sur ELLE, histoire de l’oublier une bonne fois pour toute. Elle m’envoyait parfois un regard incertain comme un lanceur de couteaux qui projette des points d’interrogation. Je ne répondais pas à ses bonjours lancés à la cantonade quand elle entrait dans la salle en remuant sa croupe bien moulée dans son jeans délavé (ciel je replonge !).

Bref, je lui faisais la « gueule » !

Finalement Sandrine ne me connaissait que lorsqu’elle avait besoin de moi, pauvre cloche serviable, comme la fois où elle m’avait demandé de l’aider à décoller la vieille tapisserie de l’appartement qu’elle venait d’acheter dans le vieux Grasse ou quand elle eut la lubie d’assister au festival de Cannes.

Mais c’était fini, j’avais juré de ne plus me laisser avoir.

Pour meubler mon temps libre dû à l’absence de mes chers élèves, je rangeais mon labo qui était dans un désordre indescriptible. Le garçon de laboratoire était en congé de maladie depuis plus de six mois à cause d’un eczéma diplomatique provoqué, d'après-lui,  par les émanations des produits chimiques stockés dans le labo.

Ce jour-à, à quatorze heures trente, quelqu’un frappa à la porte…

 

A suivre

 

Notes :

 

* "Le cœur a ses raisons que la raison ne connaît point. " est un adage philosophique de Blaise Pascal issu de ses Pensées. Stylistiquement, cette citation est une diaphore puisque les raisons et la raison sont à prendre dans deux sens différents.

 

 


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1. anaflore  le 12-06-2014 à 09:14:34  (site)

adage est bien employé ..;j'y pensais bon courage

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posté le 07-06-2014 à 09:06:49

Grasse (100).

 * 

Bon, je dois avouer, qu’à la fin du film, je n’avais réalisé aucun de mes fantasmes concernant Sandrine.

Je voyais bien qu’elle m’en voulait de l’avoir privée d’une promenade sur la Croisette. Moi, pendant toute la séance, j’avais bien envie de l’embrasser sur la bouche, mais je n’ai pas osé. Quant à caresser sa cuisse, je craignais une réaction brutale de sa part. Je n’ose même pas invoquer les fantasmes plus « hards » que mon cerveau avait élaborés. Pour les gâteries buccales, je me contenterai dorénavant de celles prodiguées avec générosité par Madame Coqualo dans le local à poubelles de mon immeuble.

Dehors, nous nous dirigeâmes, sans parler, vers ma voiture qui nous attendait sans dommages à une centaine de mètres de là. J’avais conscience de ma nullité et j’allais aimer cette fille en silence, platoniquement, juste pour alimenter ma source de poèmes.  

Il ne me restait plus que le voyage à Bamako pour redorer mon égo qui traînait dans les égouts.  Un voyage dangereux de près de 6000km était-ce bien raisonnable ? D’abord le vol à bord d’un avion peu sûr appartenant à une compagnie qui figurait en bonne place sur la liste noire des plus calamiteuses, ensuite l’état de délabrement politique du Mali, le risque d’être enlevé par des bandes de rebelles et surtout les maladies.

Cannes était située à 18km de Grasse et Bamako à 6000km, cherchez l’erreur !

Bon, nous marchions depuis peu sur le trottoir, quand nous rencontrâmes Basile.

Basile, un des profs d’EPS du lycée, tout le contraire de moi ! Sportif, dragueur et sûr de lui.

Cela me fit mal quand je vis Sandrine se jeter pratiquement dans ses bras avec une lueur dans son œil droit qui ressemblait étrangement à de la concupiscence. Ils échangèrent un regard qui me fit froid dans le dos. Un regard qui en disait long sur leurs relations dans les vestiaires du gymnase du lycée. Comment pouvais-je lutter contre ce « mec décérébré » qui racontait des blagues à deux balles qui faisaient tant rire les filles ?

 Il ne faisait pas très chaud et pourtant Basile portait un simple tee-shirt dégoulinant de muscles.

Sandrine sans façon, lui tâta les biceps :

- Je vois qu’ils sont toujours aussi durs, lui dit-elle en roucoulant.

Il répondit :

- Tu sais bien que tout est dur en moi !

Elle éclata de rire.

Moi, je n’existais plus pour elle.

Je me demandais même si j’avais des biceps.

Lentement je commençais à subir une métamorphose inversée, qui, en passant par le stade de chenille, allait aboutir à une larve molle, aplatie et invertébrée.

Basile me regarda presque avec pitié. Sur le ring de la drague, il allait me battre par KO avant la première minute du premier round.

- Et si on allait boire un verre, dit-il en rigolant.

Il avait le rire facile, moi pas.

Sandrine accepta sans me demander mon avis. Moi je les suivis, comme un chien errant à un mètre  d’eux, sur le trottoir étroit.

Il commanda un whisky, elle aussi et moi une limonade !

Je me justifiais :

- Je dois conduire, je ne peux pas boire d’alcool !

Basile répliqua en riant :

- Moi aussi je conduis, mais je bois ce que je veux !

Elle le regarda comme on admire un héros. Moi j’étais simple soldat de la guerre 14-18, pataugeant dans les tranchées boueuses infestées de rats.

A un certain moment, il se pencha vers son oreille et lui murmura quelque chose. Alors, Sandrine, un peu gênée quand même, me dit :

- Ca ne te fait rien si je retourne à Grasse dans la voiture de Basile ?

J’eus l’impression, qu’à ce moment-là, un nazi ouvrait pour moi la porte d'un four crématoire…  

 

A suivre

 

 

 


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1. aiden  le 07-06-2014 à 13:42:39  (site)

bonjour prof j adore ton histoire, si elle est vrai elle est passionante je vais donc lire ton blog aiden

2. anaflore  le 10-06-2014 à 22:09:12  (site)

c'est pas de chance !!!bonne soirée

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